DOSSIER

Depuis plus de trois ans, l’Association ardennaise de soins à domicile met à la disposition de ses infirmiers et aides-soignants un kit d’aides techniques. Il contribue à la prévention des troubles musculosquelettiques (TMS) des salariés et au bien-être de leurs patients.

Les intervenantes à domicile sont équipées d’un kit d’aides techniques qui tient dans un sac à dos.

Les intervenantes à domicile sont équipées d’un kit d’aides techniques qui tient dans un sac à dos.

Faire la toilette des patients, les habiller, les transférer de leur lit au fauteuil, les aider à se déplacer… telles sont les interventions quotidiennes des aides-soignantes du service de soins infirmiers à domicile (Ssiad) géré par l’Association ardennaise de soins à domicile (Aasad). Basé à Revin, dans les Ardennes, et entièrement financé par l’Agence régionale de santé, ce service comprend 25 salariés, dont trois infirmières et 19 aides-soignantes. « Notre capacité d’action est de 90 places pour personnes âgées malades et/ou dépendantes et sept places pour des personnes en situation de handicap », précise Dolorès Pauwels, infirmière coordinatrice et responsable de service de l’association. « Notre mission est de les assister, tout en les laissant utiliser au maximum leurs capacités, afin de les maintenir chez elles le plus longtemps possible », explique Martine Pauwels, aide-soignante dans la structure depuis 34 ans.

Lors des interventions à domicile, l’effort physique nécessaire aux soignants pour mobiliser les bénéficiaires varie selon le degré de dépendance des patients, leur pathologie, leur capacité et leur volonté de participer aux soins, leur morphologie. D’autant que « le degré d’autonomie change constamment pour un même patient », souligne Thierry Grosset, contrôleur de sécurité à la Carsat Nord-Est. La prévention des troubles musculosquelettiques (TMS) des salariés se trouve donc au cœur des préoccupations de l’association. Depuis septembre 2014, le déploiement d’un kit d’aides techniques permet d’y contribuer.

Des environnements complexes

Agir sur l’environnement de travail n’est en effet pas toujours possible dans l’aide à domicile. « Pour les patients alités, un lit médicalisé à hauteur variable avec potence est le minimum exigé pour que nous intervenions, souligne la responsable de service. Les dispositifs d’aides aux patients tels que les verticalisateurs, les lève-personnes, les fauteuils roulants… sont en général pris en charge par la Sécurité sociale. » L’encombrement des pièces ou leur exiguïté s’avère parfois problématique, et il n’est pas toujours facile de faire accepter aux familles de déplacer certains meubles pour faciliter le travail des soignants. « L’effort à fournir pour mobiliser les patients dépend aussi de l’agencement du domicile », note Jessica Poulain, infirmière à l’Aasad. « Certains revêtements de sol compliquent aussi les déplacements des aides sur roulettes », remarque Claudie Brouillard, aide-soignante depuis 36 ans. « Le domicile, c’est système D : il faut se débrouiller ! », résume Ludivine Hellebout, aide-soignante.

L’AIDE À LA PERSONNE, UN TRAVAIL D’ÉQUIPE

Tous les mois, les équipes de l’Aasad se réunissent par secteur  géographique pour échanger sur les patients. Des réunions trimestrielles rassemblent également l’ensemble du personnel. « Si des difficultés sont rencontrées, nous nous réunissons plus régulièrement et nous organisons des réunions de coordination avec les responsables des services d’auxiliaires de vie à domicile et les coordinateurs du conseil départemental, explique Dolorès Pauwels. Cela permet notamment de revoir le plan de soins de la personne prise en charge et de se concerter sur les aides techniques à mettre en place, en fonction de l’évolution de la dépendance du patient. »

Afin de limiter les tensions et les torsions sur le corps du soignant et de la personne soignée et d’assurer leur sécurité, les manipulations et les aides techniques doivent être adaptées à l’environnement et à l’état de dépendance du patient lors du soin. C’est une des raisons pour laquelle toute l’équipe a suivi la formation Prap 2S. « Prendre soin des autres, c’est d’abord prendre soin de soi », leur rappelle régulièrement Dolorès Pauwels.

Quand le kit d’aides techniques lui a été présenté par la commerciale d’une maison médicale, la responsable du service a souhaité le tester. Ce kit est composé de quatre éléments très légers, qui tiennent dans un sac à dos : un drap de glisse et une sangle pour faciliter les manipulations et remonter le patient dans son lit sans effort, un coussin de rehaussement pour permettre de repositionner le patient dans un fauteuil et, enfin, une ceinture de maintien qui peut être positionnée soit sur l’aidant, soit sur le patient pour sécuriser ce dernier lors de la marche.

La préservation de la santé des salariés va souvent de pair avec le maintien de l’autonomie des patients.

L’expérience menée avec quelques salariées ayant été concluante, l’association a acheté 25 kits pour l’ensemble de ses salariés, remplaçants compris. Le fournisseur a formé l’équipe à l’utilisation du matériel sur une demi-journée, par petits groupes. « Il est assez simple d’utilisation », admet Martine Pauwels. Même si elles réalisent moins fréquemment des soins exigeant des manutentions, les infirmières disposent aussi d’un kit car elles effectuent la première toilette du patient afin d’évaluer son degré de dépendance et le besoin en matériel qui sera nécessaire à sa prise en charge optimale. Elles assistent parfois les aides-soignantes pour les patients dont les soins sont plus difficiles…

Dans la pratique, le kit n’est pas utile à chaque intervention, mais tous les soignants y ont eu recours au moins une fois et ont pu constater son intérêt. En début de carrière, ils ressentent en général moins le besoin de l’utiliser : « On sent que le dos est moins sollicité grâce au drap de glisse », reconnaît Bryan Gueret, élève-infirmier en stage dans l’association depuis deux semaines, qui a été formé aux techniques de manutention sans l’utilisation de ce type de matériel.

Les différents éléments du kit sont aussi bien acceptés par les personnes aidées. « J’ai réussi à faire marcher à nouveau une patiente grâce à la sangle du kit, qui lui a permis de se sentir en confiance », se réjouit Ludivine Hellebout. « La préservation de la santé de nos salariés va souvent de pair avec le maintien de l’autonomie des patients, constate la chef de service. Elle représente un engagement et un objectif fort des membres du conseil d’administration et du président de l’association. » Le kit fait partie de la démarche engagée depuis plusieurs années par l’Aasad pour améliorer l’ensemble des conditions de travail de l’équipe.

LA PRÉVENTION DES SOIGNANTS SE JOUE AUSSI SUR LES ROUTES

À la suite d’un accident de la route ayant entraîné le décès d’une aide-soignante de 22 ans se rendant au domicile d’un patient, l’association a réorganisé en 2000 les tournées de ses salariés afin de limiter leurs déplacements routiers. En hiver, les parcours sont modifiés pour éviter certaines routes dangereuses quand les conditions météorologiques se dégradent. Les salariés sont par ailleurs équipés de téléphones portables géolocalisables qui font aussi office de dispositifs d’alerte en cas de panne, d’accident ou d’agression sur les routes. Ces téléphones permettent également d’accéder au dossier des patients via un badge installé à l’entrée de leur domicile.

Dans le cadre de la prévention du risque routier et des TMS, les véhicules de service sont changés très régulièrement. L’association envisage aussi de faire suivre aux salariés une formation à la conduite et au maintien d’une bonne posture au volant. Le temps passé par les soignants sur les routes n’est pas négligeable. Au total, en 2017, l’ensemble du personnel a parcouru 181 800 km.

Katia Delaval

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