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Le réemploi des déchets de production

Réinjecter le plastique dans la fabrication

Le site d’injection plastique Velfor-Apira s’est équipé il y a deux ans d’un broyeur pour recycler une partie des pièces non conformes et des carottes d’injection résiduelles, afin de réemployer la matière dans la production. Les risques ont été pris en compte dans l’aménagement du poste.

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Céline Ravallec - 14/02/2023
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Un salarié de l'entreprise renverse des granulats broyés dans une trémie.

« Le plastique souffre d’une mauvaise image. Plus que jamais il faut se renouveler et montrer ses capacités de recyclage. » Philippe Matter, directeur de l’entreprise Velfor-Apira (anciennement Apira plasturgie), spécialisée dans l’injection plastique et basée à Belmont-Tramonet, en Savoie, est conscient des enjeux autour de la matière plastique. L’établissement produit en tant que sous-traitant des références multiples et variées pour ses clients : raquettes à neige, éléments plastiques pour petits appareils électroménagers ou boîtiers de systèmes d’alarmes pour habitations, pour n’en citer que quelques-unes. « Nous sommes capables de faire n’importe quel type de pièces plastiques pour n’importe quel domaine et pour n’importe quel client », poursuit le directeur. Le site fabrique également quelques produits en propre.

« Dans la plasturgie, c'est aujourd'hui un passage obligé de gérer les rebuts et de les valoriser. »

Rachetée par le groupe Velfor au début de l’année 2022, l’usine connaît actuellement une phase de transition. Un parc de vingt presses à injecter, dont quinze presses électriques neuves, a été récemment installé pour développer très prochainement l’activité. Fondée dans les années 1970, Apira plasturgie a connu plusieurs rachats au cours de son existence, ainsi que des réorientations de sa production. Longtemps cantonnée à un fonctionnement artisanal, elle avait déjà franchi une étape vers une organisation plus industrielle à l’occasion de son précédent rachat il y a sept ans.

Des perspectives de recyclage

Cela fait ainsi un certain nombre d’années que l’entreprise se préoccupe des perspectives de recyclage de la matière plastique. En témoigne la présence de plusieurs broyeurs à proximité des presses à injection. La matière thermoplastique injectée offre en effet, au contraire des plastiques thermodurcissables, la possibilité de recycler la matière première – après broyage – et de la réinjecter dans la production. Les broyeurs concassent les carottes d’injection, ces éléments plastiques nécessaires à la fabrication mais qui sont perdus ensuite pour le produit fini et constituent un déchet. Ces carottes d’injection sont alors transformées en granulats, ramenant la matière à sa forme initiale.

Mais à une extrémité de l’atelier se situe un broyeur beaucoup plus imposant. Positionnée dans un local clos, la machine sert à broyer les pièces non conformes sortant des presses. L’entreprise a pris en compte les conditions d’intervention autour de celle-ci pour limiter les risques liés à cette activité annexe. Cela a d’ailleurs fait l’objet d’un contrat de prévention avec la Carsat Rhône-Alpes il y a deux ans. Selon les volumes à traiter, des campagnes de broyage de pièces non conformes sont régulièrement organisées, en fonction des teintes des produits.

« Le broyeur est installé dans un local clos, isolé, et est équipé d’un caisson insonorisant pour limiter les nuisances sonores dans l’atelier voisin, remarque Olivier Tompa, contrôleur de sécurité à la Carsat Rhône-Alpes. Et cela limite également les émissions de poussières. » Un système d’aspiration a été mis en place pour récupérer les particules de plastique les plus fines. « Les fines sont considérées comme une charge inerte, poursuit-il. Mais autant qu’elles ne se retrouvent pas dans les alvéoles pulmonaires. » Dernier risque à traiter autour de la machine : des fines résiduelles s’accumulent au sol et constituent un risque de glissade.

CAROLINE MEUNIER, RESPONSABLE QSE DU GROUPE VELFOR

« Le groupe Velfor comprend 270 salariés répartis sur sept sites, ayant chacun ses spécificités de production. Apira est le dernier site en date ayant rejoint le groupe. Et c’est le seul à réaliser de l’injection plastique. Depuis mon arrivée en mars 2022, ma mission consiste à piloter à l’échelle du groupe la qualité, la sécurité et l’environnement, et à harmoniser et mutualiser les bonnes pratiques entre les sept sites. Un de mes rôles va être de favoriser les partages et échanges  entre tous, et de structurer à l’échelle du groupe la gestion de ces sujets. Le site Apira sera certifié ISO 9001 en 2023, afin de s’aligner avec les autres entités du groupe. Nous allons bâtir ensemble une culture commune. »

« L’ancien broyeur était dans l’atelier, et très bruyant. Celui-ci reste bruyant malgré une conception intégrant une insonorisation. Mais l’avantage est qu’une fois qu’on l’a alimenté, on n’est pas obligé de rester dans le local, commente Corinne Coiret, une des opératrices à ce poste. Lorsqu’une campagne de broyage compte beaucoup de pièces, on les dispose sur une palette et on les apporte jusqu’ici à l’aide d’un transpalette. » Une récente campagne a représenté 75 kg de matière cumulée, avec des pièces présentant un poids unitaire de 120 g. « Le coût lié aux rebuts et aux pièces non conformes est loin d’être négligeable », estime le directeur. L’acquisition prochaine d’un ERP (système informatique de gestion de l’ensemble des ressources de l’entreprise) permettra d’établir des bilans précis et d’anticiper des améliorations.

Moins de bruit, moins de poussière

Les granulats broyés sont conditionnés dans des sacs de 25 kg. Ils sont ensuite reversés dans une trémie pour être réinjectés dans les presses en vue d’être mélangés avec de la matière noble, selon un pourcentage défini au préalable, en accord avec le client. Ceci sans que le produit final ait obligatoirement la même fonction. Le plastique perd en effet certaines caractéristiques physiques et mécaniques au fil des recyclages, ce qui peut réduire ses possibilités d’usage. « Certaines pièces sont produites à 100 % à partir de matière rebroyée, souligne Fabrice Thévenin, responsable d’atelier. Si ce ne sont pas des pièces d’aspect et qu’elles ne nécessitent pas une résistance mécanique particulière, ça fait tout à fait l’affaire. »

Une salariée de l'entreprise alimente le broyeur.

Une telle approche contribue à réduire les coûts et à économiser une part de matière première vierge. Elle limite également l’empreinte environnementale. Une préoccupation clairement affichée par la direction. La prise en compte des risques associés est donc dans le prolongement logique. « Dans la plasturgie, nous sommes obligés de nous remettre en question, c’est aujourd’hui un incontournable de gérer les rebuts de plastique et de les valoriser, insiste Philippe Matter. Il existe de nombreuses façons de les valoriser : les brûler, les recycler, les réutiliser en interne, comme ce que l’on est en train de faire. Il est d’ailleurs plus facile de recycler ses propres déchets que de trouver des entreprises pour les traiter. Ce qui montre parfaitement qu’il y a encore énormément de choses à inventer dans le domaine. »

D'AUTRES AXES DE PRÉVENTION

Le contrat de prévention en cours avec la Carsat Rhône-Alpes porte sur le broyeur, mais également sur d’autres axes de prévention. Un poste de sertissage a ainsi fait l’objet d’un aménagement ergonomique. L’opération, qui se faisait auparavant avec une sertisseuse manuelle, est désormais mécanisée, à la grande satisfaction de Corinne Coiret, une opératrice. « Mes épaules sont contentes, il n’y a plus d’effort à faire au niveau des bras grâce à cette machine. On l’actionne au pied, en appuyant sur la pédale. Et le poste est bien conçu, on peut l’adapter à la taille de chacun. » L’achat de presses électriques a aussi été encouragé. « Elles présentent beaucoup d’avantages par rapport aux presses hydrauliques, souligne Olivier Tompa : elles consomment moins d’énergie, gagnent en précision, sont moins bruyantes, exposent moins aux brûlures et les fuites d’huile ont disparu. De plus, la mise en œuvre de robots de préhension réduit les gestes répétitifs liés aux déchargements des pièces. »

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