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Agroalimentaire

Abattage de volailles : des progrès en batterie

Près de 10 000 tonnes de volailles fermières label rouge et bio sont abattues chaque année et transformées par les Fermiers de l’Ardèche. Un travail répétitif, parfois dans le froid, exposant aux poussières et aux risques de troubles musculosquelettiques. De nombreux postes ont été revus.

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Delphine Vaudoux - 14/09/2023
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Des salariés au poste d'accrochage.

Le site de production des Fermiers de l’Ardèche est situé à quelques kilomètres des bords du Rhône, sur la commune de Félines. Là, 6,5 millions de volailles sont abattues chaque année pour être vendues entières, ou bien découpées et mises en barquettes. Les salariés, amenés à effectuer des gestes répétitifs, parfois dans le froid, sont exposés aux risques de troubles musculosquelettiques (TMS). Ciblée TMS Pros en 2014 par le réseau Assurance maladie-risques professionnels, l’entreprise a su relever le défi, en se lançant dans l’analyse des postes de travail pour trouver des solutions.

« Les Fermiers de l’Ardèche ont été créés il y a 45 ans. Alors qu’ils s’appelaient encore SA Barou, ils ont rejoint le groupe LDC en 1999 », explique Olivier Sassolas, le directeur du site ardéchois où l’on abat, découpe, conditionne et envoie dans toute la France des volailles label rouge et bio. 144 salariés travaillent sur ce site, ainsi que des intérimaires auxquels il faut recourir périodiquement pour faire face à cette activité saisonnière. « Les postes de l’atelier conditionnement ont été les premiers à être identifiés comme extrêmement sollicitants pour les membres supérieurs, souligne Catherine Mousny, ingénieure-conseil à la Carsat Rhône-Alpes. Les locaux sont exigus, il fait froid, il y a des croisements de flux en permanence, et l’activité est très manuelle et répétitive. »

6,5 millions de volailles sont abattues chaque année par l’entreprise.

Un constat qui signe le début d’une collaboration fructueuse entre la Carsat Rhône-Alpes et l’entreprise. « Mais ce qui a fait réellement bouger les lignes, c’est lorsque Nadège Bugnazet a été formée personne ressource sur le sujet. Elle occupe désormais le poste de coordinatrice santé et sécurité », poursuit l’ingénieure-conseil. Dès lors, une démarche de prévention des risques professionnels plus large est entreprise, avec l’aide de l’IPRP (intervenant en prévention des risques professionnels) du service de prévention et de santé au travail, visant en particulier la cabine d’accrochage, les chariots et leur lavage, la découpe…

L'accrochage entièrement reconfiguré 

C’est au poste d’accrochage que les plus importants investissements ont d’abord eu lieu. En juillet 2020, Nadège Bugnazet réalise des entretiens individuels avec les accrocheurs mettant en évidence de nombreux sujets : cabine d’accrochage trop étroite, mauvaise ventilation, ambiance trop froide ou trop chaude, travail dans l’obscurité, problèmes de nettoyage et de maintenance à cause de grilles, accès unique… Après plusieurs mois de travaux – tout en maintenant l’activité –, la cabine est entièrement réaménagée.

Alors que l’on arrive au poste d’accrochage, Nadège Bugnazet fait varier la lumière bleue : « C’est une grande avancée ! Cela permet de régler la luminosité en fonction des espèces et de l’état de nervosité des volailles. » Les salariés positionnés d’un seul côté, attrapent les poulets qui arrivent dans des caisses sur un convoyeur. Face aux opérateurs, des dosserets aspirants limitent les poussières dans l’air – il n’y a d’ailleurs aucune odeur dans la cabine – et les opérateurs peuvent s’asseoir sur une sorte de petit banc, entre deux lots.

FOCUS SUR LE POSTE D'ACCROCHAGE

La nouvelle configuration du poste d’accrochage comprend des caissons aspirants afin de réaliser le captage à la source, tandis qu’un système d’aspiration et de filtration envoie les effluents aspirés vers une centrale de traitement d’air avec dépoussiéreur à décolmatage automatique, situé à l’extérieur du bâtiment. Des grilles amovibles facilitent la maintenance et le nettoyage. Un système de soufflage permet le chauffage et le rafraîchissement du local. Une chaussette au plafond amène de l’air de compensation sans courant d’air. La cabine est neuve, spacieuse et isolée acoustiquement. Les murs lisses facilitent le nettoyage, et des barres d’assises permettent aux opérateurs de s’asseoir entre deux lots. Enfin, la lumière bleue, destinée à calmer les volailles, est réglable.

« La cabine est plus longue, plus confortable. Il y a désormais deux portes d’accès et des grilles amovibles, et c’est le premier opérateur qui active l’avancée des caisses, avec son genou », souligne Nadège Bugnazet. Raphaël Régal, un accrocheur, précise : « Il y a longtemps, les caisses arrivaient fermées, il fallait déjà les ouvrir puis les renvoyer vides, manuellement. » « Le quai est plus long, ça nous change la vie, complète Murat Uckuyulu, le responsable de l’abattoir. On a participé au groupe de travail pour faire remonter nos besoins, comme le banc ou le lavabo. » Afin de valider l’efficacité du système d’aspiration, des prélèvements ont été réalisés par le laboratoire interrégional de chimie de la Carsat en juillet dernier. Les résultats étaient attendus pour le courant de l’été.

Les volailles abattues sont ensuite plumées automatiquement, puis cheminent pour être soit découpées, soit bridées afin d’être vendues entières. À la découpe, la température avoisine les 4 °C. L’espace a été agrandi en 2022/2023 pour réaliser des aménagements destinés à réduire les TMS liés aux gestes répétitifs et à une cadence contrainte. Une machine de découpe semi-automatique enlève désormais les tarses, les cuisses et les ailes, laissant juste le coffre de la volaille sur la chaîne pour que les opérateurs prélèvent les filets. « Avant, les opérateurs risquaient de se couper car ils utilisaient un sécateur pour enlever la tarse », remarque le directeur du site.

Des salariés au poste de bridage.

Au poste de bridage, opération qui consiste à contrôler le bon vidage de la volaille qui arrive entière, et à lui attacher les pattes et ailes, des tabourets sont à la disposition des salariés qui travaillent sur des caillebottis. Les déchets, qui étaient envoyés au-dessus des caisses avec des gestes répétitifs nécessitant une extension des bras, sont désormais aspirés au bout de la ligne. Une fois prêtes, les volailles sont soigneusement alignées sur des chariots, qui ont également fait l’objet de modifications. 24 nouveaux ont été achetés, avec un premier niveau à 40 cm du sol et un dernier à moins de 1,80 m. « Ça permet de limiter les contraintes posturales, remarque Catherine Mousny. En attendant de tous les remplacer, il faut veiller, sur les anciens, à ne pas déposer de volailles aux premiers et derniers niveaux. » Chaque jour, un opérateur les nettoie avec une solution à base de chlore. Pour ce faire, il est équipé d’une tenue et d’un masque à ventilation assistée, qui ont d’abord été testés avant d’être adoptés.

Au conditionnement, une nouvelle formeuse permet de préparer différents formats de cartons. Et, bientôt, l’ensemble des locaux de conditionnement et d’emballage devraient être agrandis et réaménagés afin d’améliorer les conditions de travail et répondre éventuellement à des volumes plus importants, à la multiplication des références et accueillir, aux expéditions, un nouveau système de contrôle automatique des palettes. Des aménagements qui, comme les précédents, devraient avoir lieu tout en maintenant la production… Un vrai défi.

FICHE D'IDENTITÉ

Nom : Les Fermiers de l’Ardèche
Lieu : Félines (Ardèche)
Activité : abattage, découpe, conditionnement et expédition de volailles fermières
Effectif : 144 salariés (plus des intérimaires)
Production (2022) : 9 706 tonnes
Chiffre d’affaires (2022) : 54 millions d’euros

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