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Chantier hors normes

Parc éolien en mer de Fécamp : construction des fondations gravitaires

De loin, on aperçoit leurs « têtes jaunes » qui constitueront la partie émergée du parc éolien en mer de Fécamp. Les 71 fondations gravitaires, réalisées quai de Bougainville au Havre par le groupement BSB pour EDF Renouvelables, ont fière allure… Un chantier colossal, réalisé en un temps record tout en assurant la sécurité des intervenants.

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01/09/2022
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Vue des fondations gravitaires du parc éolien en mer de Fécamp

« Ce sont un peu comme des pieds de parasol », lance Nicolas Jestin, le directeur de production onshore chez Bouygues Travaux Publics, pour décrire le principe des fondations gravitaires – les gravity based structures (GBS) – du futur parc éolien en mer de Fécamp. Sur un site de 27 hectares, loué au Grand Port Maritime du Havre, en Seine-Maritime, le groupement BSB – pour Bouygues Travaux Publics, Saipem, Boskalis – réalise 71 fondations qui supporteront les éoliennes qui seront installées entre 13 et 20 km au large de Fécamp.

Un lieu futuriste, pour un travail de titan, à réaliser dans un temps contraint, dans le respect des conditions de sécurité. « Le top départ du projet a été donné en juin 2020 : c’est un chantier cadencé, très court, poursuit le directeur. Pour que l’on puisse l’achever d’ici l’été 2022, nous nous sommes organisés un peu comme une chaîne automobile. À la différence près que ce sont les équipes ultra-spécialisées et leurs outils qui avancent au fur et à mesure sur les GBS. » Car si ces GBS sont similaires, elles ne sont pas pour autant identiques…

Le chantier est organisé en quatre lignes de production, chacune équipée de quatre grues à flèche relevable, circulant sur des rails. De part et d’autre des voies s’érigent les 18 GBS (17 sur la dernière ligne), chacune étant considérée comme une unité indépendante et disposant de ses propres moyens. « Nous avons été consultés très tôt par le groupement qui a voulu nous faire part de son analyse des risques professionnels et des solutions trouvées. Et dans l’ensemble, elles nous convenaient », remarque Laurent Boudet, contrôleur de sécurité à la Carsat Normandie, qui continue de prodiguer ses conseils, interpellé sitôt arrivé sur le chantier.

Des risques XXL

La construction d’une fondation se décompose en onze étapes, depuis le radier de 31 m de diamètre en passant par les six levées, la précontrainte, la peinture, les équipements et les travaux de finition, pour terminer par le commissioning. Pour limiter les risques, le site est organisé en zones d’activité : une pour la construction des GBS, une pour la préfabrication au sol des armatures, et une troisième pour les composants électriques qui seront insérés dans les fondations. Tous les métiers du génie civil sont représentés, parmi les plus de 1 000 personnes 1 sur le site. La montée en charge ayant dû être réalisée sur un temps très court, il a fallu mobiliser rapidement des compagnons. « Cela s’est accompagné de formations, notamment pour les intérimaires, sur la prévention et la sécurité », souligne Quentin Fily, le responsable prévention santé-sécurité de Bouygues Travaux Publics.

« On a identifié quatre risques majeurs, poursuit-il : le levage, la coactivité engins-piétons, les chutes de hauteur et les chutes d’objets. Les activités ont été analysées dans le PPSPS 2 afin d’anticiper et de réduire les risques. » La soixantaine de grutiers a été formée pendant une semaine à la spécificité des grues à flèche relevable de grande capacité type MR 608, avec délivrance d’un Caces (certificat d’aptitude à la conduite en sécurité) adapté réalisé avec une évaluation en situation de travail. Sur la partie centrale, des travées sont équipées de rails pour les grues, d’autres sont réservées à la circulation. De très nombreux engins et piétons se déplacent à longueur de journée, le site étant ouvert 5,5 jours sur 7 et le travail organisé en 2 x 8 pour la majorité des équipes, en 3 x 8 pour certaines.

« Pour gérer la coactivité engins-piétons, nous avons cherché à séparer les flux, tout en laissant au chantier la possibilité d’évoluer, et surtout, de laisser des accès aux GBS », remarque Quentin Fily. Glissières de sécurité et marquage au sol ont été installés, ainsi que des zones de vitesse (30 km/h sur le site, 10 km/h près des postes de travail), et chaque arrivant doit suivre un protocole de sécurité.

Les GBS mesurant de 48 à 54 m de haut, selon leur localisation en mer, les chutes de hauteur constituent une préoccupation de tous les instants. La première mesure mise en place est de maintenir le chantier en ordre. Partout, des panneaux, rouges ou verts, ou encore des PV de mise en service et de réception journalière donnent ou pas l’autorisation d’accès aux embases. Des protections collectives sont installées : passerelles, échafaudages, coffrages, et ascenseurs dès que la partie verticale de la GBS est atteinte. Un autocollant sur le casque identifie les compagnons autorisés à actionner les ascenseurs. Pour des questions de visibilité, la partie émergée des GBS est peinte en jaune. « Les peintres disposent d’un échafaudage bâché, chauffé, ventilé et autoporté qui renforce le confort et la prévention des risques de chute », remarque Laurent Boudet.

Les fondations gravitaires sont hautes de 50 mètres en moyenne

Vigilance

Enfin, compte tenu de la hauteur des GBS, les chutes d’objet sont aussi un enjeu majeur. « Pour les prévenir, nous sommes intervenus sur la technique et les facteurs humains, remarque Quentin Fily. On a cherché à mettre toute les personnes au même niveau en matière de perception du risque pour leur faire comprendre qu’un objet tombant de 50 m, ça peut faire très mal. » Une campagne de communication, comprenant des affichettes « Plus jamais ça » apposées sur le chantier et des petits films réalisés avec des personnes témoignant de chutes d’objets, a été réalisée. Présentés en petits groupes, les films ont permis de lancer le débat et de trouver des solutions d’amélioration. « On a aussi fait tomber un cône de 6 kg sur une hauteur de 10 m, sur un casque dans lequel on avait mis un melon symbolisant un crâne », poursuit Quentin Fily. Résultat ? Il ne restait plus grand-chose du melon…

La vigilance est le maître-mot sur ce chantier qui va bientôt se terminer pour sa partie terrestre. Cet été, les GBS, 5 000 tonnes l’unité, seront chargées trois par trois sur des barges pour aller dans le parc éolien en mer de 60 km2. Elles seront posées sur le fond de la mer, sans s’y ancrer, lestées, puis équipées d’éoliennes… Mais c’est une autre histoire. 

FICHE D'IDENTITÉ

Activité : réalisation des fondations gravitaires du futur parc éolien en mer de Fécamp

Lieu : Le Havre (Seine-Maritime)

Groupement d’entreprises : Bouygues Travaux Publics/Saipem (génie civil, transport en mer et installation), Boskalis (préparation du sol marin, ballastage…)

Début du chantier : juin 2020

Départ des barges : été 2022

Effectif : jusqu’à 1 000 personnes

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