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Bâtiment et travaux publics

L’analyse ergonomique, pilier du dispositif de prévention

Sur le chantier du nouveau bâtiment de l’OMS, à Lyon, l’entreprise Côte, chargée des travaux d’installation électrique, applique les préconisations issues de récentes démarches de prévention. Elles visent d’une part le déchargement et les moyens d’approvisionnement du matériel au poste de travail et, d’autre part, le tirage de câbles.

5 minutes de lecture
Grégory Brasseur - 14/09/2023
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Un opérateur en situation de travail sur un chantier BTP.

Devant la sortie de métro Stade Gerland, à Lyon, les travaux du campus de l’Académie de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui ouvrira ses portes en 2024, battent leur plein. Au coeur d’un quartier phare pour la recherche médicale, scientifique et technologique, l’Académie accueillera jusqu’à 16 000 étudiants par an dans un bâtiment de sept étages et 11 000 m2. Sur place, l’entreprise Côte est chargée des travaux d’installation électrique. Si des actions ponctuelles ont été menées depuis 2017 avec le service de prévention et de santé au travail, l’activité, génératrice de manutentions, réclamait un diagnostic complet.

" Nous sommes en coactivité avec des entreprises qui n’ont pas le même niveau d’appréciation des risques. "

« En 2020, la Carsat Rhône-Alpes nous a interpellés dans le cadre du programme de prévention TMS Pros, se souvient Benjamin Massacrier, responsable QHSE (qualité, hygiène, sécurité, environnement). Nous l’avons perçu comme une opportunité pour nous structurer en prévention et j’ai alors suivi une formation “personne ressource”. » Opérateurs, managers, direction, représentants du personnel, préventeurs : un groupe de travail est constitué et Côte se fait accompagner par un cabinet d’ergonomie. En premier lieu, l’entreprise cible le déchargement du matériel et le transfert des charges depuis les zones d’approvisionnement jusqu’au poste de travail, en transitant par des zones de stockage intermédiaire. « La tâche est complexe. Nous sommes en coactivité avec des entreprises qui ont le même terrain de jeu mais pas le même niveau d’appréciation des risques », constate Franck Maginot, responsable d’agence tertiaire. Sur place, tous ces acteurs empruntent les mêmes accès et utilisent les moyens de levage présents (grues, monte-charges, ascenseurs…).

Analyser pour anticiper

« Avec le groupe TMS, on a repensé la caisse à outils standard, évoque Louis Menetrieux, assistant chargé d’affaires et élu CSE/CSSCT. Une étude a été menée sur le poids des outils, le nombre d’allers et retours quotidiens avec le matériel… Le matin, tous passaient bien vingt minutes sur l’approvisionnement ! Le matériel électroportatif était emporté partout par crainte des vols. » Au 2e étage, le chargé d’affaires montre un coffre sur roulettes dans lequel sont stockés ces équipements, dans un local fermé. Autre sujet : les plates-formes individuelles roulantes légères (Pirl), utilisées pour poser les câbles dans les cheminements. « Nous proposons des Pirl télescopiques et donc de hauteur variable, adaptables à différents postes de travail, reprend Louis Menetrieux. Nous avons réfléchi aux chemins à créer pour ce qui est lourd et aux évolutions à prévoir au fil du chantier. »

50 km de câbles doivent être tirés pour la partie courant fort, sur ce seul chantier de l’Académie de l’OMS.

Depuis février, les opérateurs ont tous, en plus de la caisse à outils, un sac à dos léger, avec lequel ils se déplacent sur le lieu d’intervention en n’emportant que le strict nécessaire : pour chaque situation de travail, les besoins associés ont été identifiés. « C’est pratique mais le sac est un peu fragile », estime Joseph Panzu, un opérateur. « Le groupe a proposé des solutions concernant l’approvisionnement en matériel sur les chantiers, les moyens de prévention collective, l’allègement du matériel, la préparation des boîtes d’outillage, la gestion des zones de stockage au plus près des interventions, avec un plan d’action déployé dès septembre 2021 », résume Benjamin Massacrier. « Il s’agit de mesures techniques ou organisationnelles pouvant être dupliquées ou adaptées d’un chantier à l’autre », précise Christine Chapus, contrôleuse de sécurité à la Carsat Rhône- Alpes. Point important : les chargés d’affaires ont été impliqués d’entrée de jeu. « Un guide reprend nos attentes et les moyens nécessaires (équipements, stockage…) pour maîtriser les manutentions et améliorer la prévention. Tout cela est chiffré et intégré dans les devis », souligne le responsable QHSE.

Mobiliser le terrain

« Dans nos audits de chantiers, nous avons intégré des focus TMS et manutentions. Le déploiement n’est malheureusement pas toujours homogène, explique Franck Maginot. Il faut se donner du temps, impliquer la ligne managériale (conducteurs de travaux, chefs de chantier, chefs d’équipe) et faire remonter l’information sur les solutions mises en oeuvre. » Pour pérenniser l’action, l’entreprise a formé de nouveaux référents prévention. Un deuxième projet sur le tirage de câbles (au plafond ou dans le faux plancher) a associé des opérationnels du tertiaire et de l’industrie avec toujours, comme point de départ, une phase d’observation et d’analyse. Pour mener à bien ce chantier, l’entreprise a bénéficié d’un financement dans le cadre du Fact (fonds pour l’amélioration des conditions de travail).

Un opérateur met en place une Pirl sur un chantier.

« L’analyse a été menée sur ce bâtiment de l’OMS avec un préventeur du service sécurité, un membre de la CSSCT formé et le même cabinet d’ergonomie », précise Christian Don, chargé d’affaires. « Des chariots dérouleurs de tourets, stockés au plus près de la zone d’emploi, permettent de réduire certaines manutentions », indique Louis Menetrieux. L’analyse des situations de travail a fait émerger des pistes de réflexion : améliorer les phases de préparation, bien choisir la méthode de tirage, faciliter la manutention des tourets, réduire les contraintes d’utilisation et de manutention des Pirl, coordonner le travail des tireurs de câbles pour « donner plus de mou », positionner les câbles de façon à limiter les contraintes… Des cannes souples ou des perches sont envisagées pour guider les câbles dans les cheminements depuis le sol, limiter le nombre de montées et descentes des Pirl et ainsi réduire les risques de chute de hauteur.

D’un éventail de solutions touchant à la préparation des chantiers, la méthodologie ou le matériel, il faut trouver la combinaison adaptée à chaque cas. « La démarche TMS Pros a été un levier, estime Benjamin Massacrier. Une approche similaire a déjà été conduite sur d’autres sujets, comme le risque électrique. » Cela demande d’investir du temps, de laisser le équipes s’approprier le dispositif, avec parfois une remise en cause des habitudes de travail.

FICHE D'IDENTITÉ

Nom : Côte
Lieu : Saint-Maurice-l’Exil (Isère), siège de l’entreprise ; Lyon (Rhône) pour le chantier
Activité : conception, déploiement et suivi technique de solutions d’installations électriques pour l’industrie, le tertiaire et l’énergie
Effectif : plus de 200 collaborateurs

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