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Rénovation ferroviaire

Quand la modernisation va bon train

Le marché du transport ferroviaire se porte bien. C’est d’ailleurs tournée vers l’avenir que l’usine centenaire Caf de Bagnères-de-Bigorre, dans les Hautes-Pyrénées, a entamé sa métamorphose. Un bâtiment inauguré en 2019 préfigure des futurs espaces d’assemblage et de rénovation des trains, dans lesquels l’amélioration des conditions de travail n’est pas oubliée.

5 minutes de lecture
Grégory Brasseur - 21/03/2023
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Des salariés de l'entreprise CAF.

Cette image est peut-être celle de l’avenir du site industriel de Caf France. À Bagnères-de-Bigorre, le spécialiste de la fabrication et de la rénovation de matériel roulant ferroviaire a mis en service en 2019 un atelier moderne, aujourd’hui dédié à la rénovation des rames du RER A et à la construction d’un locotracteur pour la RATP. Dans un délai de trois ans, une transformation majeure de l’usine des Hautes-Pyrénées est attendue, avec pour lignes directrices l’optimisation de la capacité et des moyens technologiques ainsi que l’amélioration des conditions de travail des salariés. Ils sont actuellement 142 sur site, mais la croissance pourrait permettre d’envisager des recrutements.

« Nous rénovons complètement 22 rames du RER A, dont 4 actuellement dans l’atelier. En parallèle, 12 locotracteurs sont en fabrication », explique Jean-Yves Yung, le directeur industriel. Les trains arrivent à Tarbes par voie ferrée, puis jusqu’ici par convoi routier exceptionnel. « Une rame, c’est 5 véhicules de 18,5 mètres de long et 60 tonnes. Dans l’atelier de 120 mètres sur 30, les opérateurs bénéficient du dégagement nécessaire autour des postes de travail. Le plus haut point du bâtiment est à 15 mètres, détaille Patrice Masselin, responsable informatique du site et des travaux neufs lors de la conception. Nous avons deux palonniers de 2 fois 20 tonnes, mais désormais les déplacements de véhicules se font au sol, grâce à des robots télécommandés. » Pas de doute, le bâtiment a été pensé pour le gigantisme des opérations qui y ont lieu.

L’acoustique au cœur des débats

« L’entreprise a bénéficié de conseils et d’un contrat de prévention pour la conception des locaux », intervient Didier Durrieu, contrôleur de sécurité à la Carsat Midi-Pyrénées. Un dossier suivi dès le départ par le centre de mesures physiques de la Carsat. « Le contrat de prévention a notamment porté sur l’achat d’une échelle à crinolines pour accéder en toiture, le traitement acoustique des murs et plafonds par bardage perforé, la climatisation réversible avec diffusion d’air par gaine textile, l’installation de baies vitrées donnant sur l’extérieur (l’entreprise a complété en prévoyant un éclairage par luminaire générant un niveau d’éclairement de 300 lux) ou encore la réalisation de l’évaluation des risques chimiques avec le logiciel Seirich », décrit Didier Durrieu. De quoi établir un solide cahier des charges pour le maître d’œuvre, Eiffage.

22 rames de RER A seront rénovées sur le site dans le cadre du projet, partagé avec une autre usine du groupe en Espagne.

« En matière de prévention contre les nuisances sonores, nous avons validé le choix des matériaux absorbants prévus aux murs et aux plafonds, confirme Laurent Hardy, contrôleur de sécurité au centre de mesures physiques de la Carsat Midi-Pyrénées. Pourtant, après travaux, les mesures de décroissance du local 1 effectuées suivant l’arrêté du 30 août 1990 ont révélé une non-conformité des locaux à la législation en vigueur. Les mesures de réverbération 2 ont confirmé cette conclusion en qualifiant le local de “réverbérant”. Interpellés par ces résultats, nous avons réalisé que la tôle perforée était bien présente en toiture mais que le bardage des murs, prévu initialement en perforé, était lisse. »

Dès lors, une rectification s’impose et s’ensuivent des échanges – pas toujours simples – entre le maître d’œuvre et le charpentier. « La Carsat exigeait que les moyens techniques prévus par le contrat de prévention soient mis en œuvre. Nous avons donc demandé à Eiffage de revenir installer des panneaux pièges à son permettant d’atteindre les objectifs », indique Patrice Masselin. « Il est toujours plus coûteux de corriger que d’agir à la conception des bâtiments neufs, rappelle Laurent Hardy. D’autant que cela implique d’intervenir dans un atelier encombré. Nous sommes revenus mesurer les caractéristiques acoustiques de l’atelier et le temps de réverbération qui était de 3,3 s avant les travaux (pour un objectif de 1,61 s maximum) est passé à 1,58 s après. »

Modernité et flexibilité

Chef d’équipe habillage de rénovation des rames, Jérémy Dortignac décrit l’atelier avec enthousiasme : « Aucun problème de bruit, de lumière, de coactivité ou de chauffage : on travaille avec la même tenue été comme hiver. » Patrice Masselin met pour sa part en avant la sécurisation des accès aux postes de travail. « Les locotracteurs sont des véhicules de commande 100 % électriques qui pèsent 80 tonnes et mesurent jusqu’à 12 mètres. Les opérateurs accèdent à ces engins par une passerelle entourée de garde-corps, explique-t-il. Partout, nous avons veillé à faciliter les flux et le “safety first” ne s’est jamais fait au détriment de la productivité. » On le voit par exemple avec le déplacement des rames grâce aux robots, pour éviter les levages.

Un opérateur protégé par un garde-corps.

« Il a fallu travailler sur la structure des sols et l’organisation de l’espace. Au final, on y gagne en temps et en sécurité », affirme Lionel Izans, secrétaire du CSE. Si l’espace doit être modulable et adaptable au gigantisme et à la diversité des projets, l’équation n’est pas toujours simple. « Nous prévoyons de restructurer le site car il existe encore d’anciennes infrastructures. Il faut déconstruire et reconstruire des bâtiments adaptés au schéma industriel. Rénover en pensant aussi aux conditions de travail des personnes, évoque Gabriel Diris, responsable hygiène, sécurité, environnement. Caf France a d’ailleurs récemment initié la démarche “Prendre soin de soi et des autres”, qui met en avant le développement d’une culture sécurité au travail intégrant l’amélioration des conditions de travail et des impacts environnementaux. »

Cela s’est notamment traduit par une campagne de formation des managers (à la méthode d’analyse des risques ou encore à la résolution de problèmes), suivie de la sensibilisation de tous les personnels pour acquérir des standards communs. L’ambition est claire : être en capacité de répondre aux différents programmes de rénovation ou de production en assurant la sécurité des travailleurs et des opérations. L’usine vient d’ailleurs de décrocher la commande d’assemblage des tramways de Montpellier et de Marseille. Déjà une réflexion a été lancée sur l’adaptation des moyens industriels.

FICHE D'IDENTITÉ

Nom : Caf France
Activité : fabrication, rénovation et essais de matériel roulant ferroviaire. L’entreprise appartient au groupe espagnol Caf (Construcciones y auxiliar de ferrocarriles)
Lieu : Bagnères-de-Bigorre (Hautes-Pyrénées)
Effectif du site : 142 salariés (et près de 1 000 pour Caf France)
Surface : 42 000 m2 dont 23 500 m2 de bâtiments

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