Ce site est édité par l'INRS
Menuiserie

Une fenêtre ouverte sur la lutte contre les risques professionnels

Pour améliorer la santé et la sécurité de ses salariés, la direction des menuiseries Daniel Bories, à Fabrègues (Hérault), table sur une stratégie double d’investissements adaptés et d’écoute des salariés. Et ça marche.

5 minutes de lecture
Corinne Soulay - 27/04/2023
Lien copié
Un salarié de la menuiserie Daniel Bories utilise une machine automatique de découpe.

[Article paru dans le numéro de Travail & Sécurité de mars 2023]

De la salle de réunion, Laurent Cammal a une vue plongeante sur l’atelier des menuiseries Daniel Bories qu’il dirige. Un hangar de 900 m2 installé près de Montpellier, à Fabrègues (Hérault) . Pour l’heure, trois salariés sont occupés à la découpe et au perçage de barres en aluminium. Compte tenu de l’activité du lieu, un brouhaha assourdissant pourrait régner. Pourtant, quasiment aucun bruit ne filtre. Effet du double vitrage de la salle… Mais pas seulement : dernièrement, le directeur a investi dans deux nouvelles machines, entièrement capotées. Des acquisitions parmi d’autres, qui participent à prévenir les risques professionnels.

L’entreprise Daniel Bories fabrique et installe des menuiseries, essentiellement en aluminium. Fenêtres, volets, portails, protections solaires, garde-corps… « Ici, les risques principaux sont ceux liés au bruit, mais aussi les chutes de hauteur et la manutention manuelle, pointe François Olivier, contrôleur de sécurité à la Carsat Languedoc-Roussillon. Or, cette entreprise se donne les moyens d’avancer en matière de prévention, avec des investissements conséquents. À chaque fois que je viens les voir, on arrive à mener des projets ensemble. »

600 chantiers par an sont réalisés par Les menuiseries Daniel Bories, quasiment tous destinés à des particuliers.

Le premier rendez-vous réussi a lieu en 2015. À l’époque, la Carsat repère une situation à risque, lorsque les opérateurs manipulent les vitres. Des pièces, de toutes tailles, sont livrées sur des chariots roulants où elles sont stockées les unes sur les autres. Or, pour récupérer celle dont ils ont besoin, les salariés doivent parfois en soulever plusieurs, leur poids pouvant dépasser les 150 kg. « Ils se mettaient à 3 ou 4 pour les transporter, puis pour coucher la bonne vitre sur des tréteaux afin de travailler dessus, se rappelle François Olivier. Nous avons fait une étude de poste basée sur la méthode d’analyse de la charge physique de travail de l’INRS 1 et cela nous a permis de proposer une subvention prévention TPE pour l’achat de deux dispo- sitifs adaptés : un palonnier à ventouse sur potence, pour transporter la vitre jusqu’au poste de travail, et une table à vitrer. »

Deux opérateurs s’attellent justement à la fabrication d’une grande baie coulissante. Une fois l’imposant vitrage déposé sur la table, ils procèdent à son encadrement par une structure en aluminium. L’opération ne requiert pas de posture contraignante : la table à vitrer s’adapte non seulement en hauteur, mais elle s’incline aussi à la verticale pour faciliter le travail des opérateurs. Elle est également dotée d’un vérin qui permet la rotation du vitrage sans effort.

De la réception à l’usinage

Récemment, deux autres postes ont aussi été améliorés, avec l’achat des fameuses machines capotées. « On reçoit des barres d’aluminium de 6 m qu’il faut découper puis usiner, précise Laurent Cammal. Avant, cela se faisait manuellement, à la scie, et cela nécessitait de retourner la barre pour pouvoir découper les deux extrémités, ce qui demandait des efforts. Puis on perçait trou par trou, à la fraiseuse. Cela prenait 40 minutes avec une machine qui produit beaucoup de bruit et de vibrations. » Aujourd’hui, une scie double-tête permet des découpes simultanées et un banc d’usinage automatisé réalise les perçages en quelques minutes. Conséquence : l’exposition au bruit ainsi qu’aux risques de TMS est considérablement réduite.

Des achats rendus possibles par un nouvel accompagnement financier de la Carsat. « Ces machines améliorent nos conditions de travail, se réjouit Aissa, le chef d’atelier. Ici, même la réception des barres d’aluminium est bien sécurisée. Là où je travaillais avant, on devait transporter des structures de 80 kg sur les épaules entre le camion de livraison et l’atelier. Là, le camion décharge directement à l’intérieur du bâtiment et, grâce au pont roulant, les barres sont dispatchées aux différents postes. »

Un salarié de la menuiserie utilise un manipulateur à ventouse de vitrage mobile sur pont de levage.

« L’entreprise s’engage aussi dans la prévention en formant ses équipes, remarque François Olivier. En 2016, dans le cadre du Programme prioritaire de prévention contre les chutes dans la construction (P3C3) 2, nous avons proposé à Laurent Cammal de suivre la formation prévention pour les encadrants de l’OPPBTP. Un employeur au fait de la réglementation développe une meilleure conscience du risque. Dans la foulée, certains salariés ont aussi été formés en SST. » Un enseignement qui a porté ses fruits : récemment, ils sont venus voir le chef d’entreprise pour l’alerter sur une situation qui leur semblait dangereuse.

« Le matin, lorsqu’ils chargeaient les camions pour se rendre sur les chantiers, ils avaient l’habitude de monter sur le toit, avec un risque de chute. Ils ont donc demandé à disposer d’un échafaudage, explique le dirigeant. C’est important d’être à l’écoute de ces remontées de terrain pour améliorer la prévention. » Ce dialogue fluide entre salariés et chef d’entreprise a également permis une adaptation des horaires. « Avant, les équipes démarraient à 7 h 30 et se retrouvaient dans les bouchons de Montpellier. Nous avons donc décidé d’avancer d’une demi-heure. Les salariés arrivent moins stressés et moins fatigués sur les chantiers, et rentrent plus tôt chez eux. »

Globalement, Laurent Cammal prône un « management participatif » : « Quand il y a des changements, c’est important que les salariés y soient associés pour que ça fonctionne. » Et ce, même lorsqu’il s’agit de marketing : en 2019, lorsque le responsable a décidé de renouveler l’ensemble des vêtements de travail, les salariés ont été mis à contribution pour trouver des messages décalés à y apposer. Résultat, aujourd’hui, tous arborent fièrement leurs t-shirts estampillés « I love menuiserie » ou « Je crois que j’ai une ouverture ».

Plus sérieusement, Laurent Cammal ne compte pas s’arrêter là. Après s’être concentré sur l’atelier, le chef d’entreprise se penche désormais sur la sécurité des chantiers. « Pour limiter la manutention manuelle lors de la pose chez les particuliers, nous louons régulièrement des minigrues araignées sur chenille pour les vitrages lourds. Nous projetons d’en acheter une pour l’avoir à disposition en permanence. »

FICHE D'IDENTITÉ

Nom : Les menuiseries Daniel Bories
Activité : conception, fabrication et pose de menuiseries en aluminium et PVC (fenêtres, vérandas, volets, portails…)
Lieu : Fabrègues (Hérault), site de production, et Mauguio, showroom
Effectif : 30 personnes
Chiffre d'affaires : 3,3 millions d’euros

Partager L'article
Lien copié
Sur le même sujet

À découvrir aussi