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Conditions de travail

Davantage de pénibilité dans l’économie verte

Une étude de la Dares a porté sur les expositions aux risques professionnels dans les métiers de l’économie verte. Le point avec l’une des co-autrices, Nathalie Havet, du Laboratoire de sciences actuarielle et financière, à l’université Claude Bernard Lyon 1.

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Corinne Soulay - 05/09/2023
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Un employé d'une usine de recyclage.

Travail & Sécurité. Pourquoi vous être intéressée au secteur de l'économie verte ?

Nathalie Havet. Nous avions déjà travaillé pour la Dares sur la question de la pénibilité au travail. Mais il s’agissait d’une étude générale. Lorsque leur revue Travail et Emploi a décidé de consacrer un numéro spécial à l’économie verte, cela nous a semblé intéressant de nous focaliser sur ce secteur, qu’on présente généralement comme vertueux : ses métiers sont à la fois censés protéger l’environnement, permettre une croissance économique et, en plus, proposer de meilleures conditions de travail aux salariés. L’idée était de savoir si cela correspondait à la réalité. Et, d’après nos conclusions, pas forcément…

Que conclut votre étude ?

N. H. Nous nous sommes basés sur l’enquête Surveillance médicale des expositions aux risques professionnels (Sumer) de la Dares et avons comparé l’exposition à trois types de facteurs : les contraintes physiques marquées (manutention de charges lourdes, postures pénibles, vibrations…), un environnement physique agressif (agents chimiques dangereux, températures extrêmes, bruit…) et des rythmes de travail atypiques (travail de nuit, travail posté…). Bilan, en 2017, alors que 61,3 % des salariés de France métropolitaine étaient exposés à un ou plusieurs facteurs de pénibilité, les salariés de l’économie verte l’étaient à 66,9 %. Plus précisément, ces travailleurs sont surexposés aux contraintes physiques marquées et à un environnement physique agressif. Leur prévalence d’exposition aux vibrations mécaniques, par exemple, se révèle entre 2,5 et 4 fois plus élevée que celle des salariés occupant des emplois hors économie verte. En revanche, ils sont un peu moins exposés au travail posté et au travail répétitif.

Comment expliquez-vous cette surexposition à certains facteurs de risque ?

N. H. Les emplois de l’économie verte comptent davantage de professions exposées à la pénibilité physique. Grâce à des modèles statistiques spécifiques, nous avons pu comparer des profils de travailleurs équivalents, présentant les mêmes caractéristiques individuelles (genre, âge, ancienneté…) et d’emploi (métiers et catégories socio-professionnelles, type de contrat, temps de travail, taille de l’entreprise, présence de CSSCT…) en économie verte et hors économie verte. Résultat : pour trois facteurs de risque – les vibrations, le bruit et les agents chimiques cancérogènes –, les salariés de l’économie verte restaient surexposés par rapport aux autres. Parmi les hypothèses, cela pourrait être dû à une politique de sécurité d’entreprise peu développée, un manque de prévention, d’innovation.

L'ÉCONOMIE VERTE, DES MÉTIERS TRÈS DIVERS

L’économie verte comprend à la fois les métiers verts, à finalité environnementale (principalement des professions liées à la production et à la distribution d’énergie et d’eau ou à l’assainissement et au traitement des déchets), mais aussi les métiers dits verdissants, c’est-à-dire des professions dont la finalité n’est pas directement environnementale, mais dont les compétences sont amenées à évoluer pour prendre en compte ces enjeux (transports, tourisme, entretien des espaces verts, architectes, poseurs en isolation thermique…). En tout, cela correspond à 15,3 % des salariés de France métropolitaine : 1,1 % occupant des emplois verts et 14,2 % des emplois verdissants.

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