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L'hôtellerie

Ibis Styles adapte les aides techniques aux espaces de travail

L’hôtel Ibis Styles de Lille a été équipé au premier semestre de lève-lits dans l’intégralité de ses chambres. Un outil qui, en réduisant les sollicitations physiques, a suscité l’adhésion de la part des femmes de chambre.

5 minutes de lecture
Céline Ravallec - 30/10/2023
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Une salariée en situation de travail dans une chambre d'hôtel.

« Les lève-lits, c’est super ! Mes chaussures de sécurité, je les kiffe ! Mon métier, je le kiffe ! » Ludivine Wauquier, femme de chambre à l’hôtel Ibis Styles Gare Beffroi de Lille, dans le Nord, ne cache pas son enthousiasme lorsqu’on la questionne sur sa profession. Occupant cette fonction depuis 25 ans dans l’établissement, elle a vu beaucoup de changements dans ses conditions de travail au fil des années. « Quand j’ai commencé, on nettoyait tout avec la même lavette, raconte-t-elle. Aujourd’hui, on en a quatre : une pour la salle de douche, une pour les poussières de la chambre, une pour les toilettes, une pour le téléviseur. »

Mais la grande innovation de l’année concerne l’installation, au premier semestre 2023, de lève-lits dans les 140 chambres de l’établissement. Marie, Priscilla, Ludivine, toutes les femmes de chambre rencontrées reconnaissent le bénéfice apporté par ces équipements dans leurs tâches quotidiennes. « C’est vraiment mieux. Même pour passer l’aspirateur sous le lit, ça nous facilite la vie », explique Priscilla Louvet, première femme de chambre, salariée ici depuis 2001. Désormais, les huit femmes de chambre de l’hôtel font les lits à la hauteur qui leur convient, sans avoir à se baisser. Elles utilisent également les lits ainsi surélevés comme support pour plier le linge de toilette avant de le positionner dans les salles de douche. Et il n’est plus nécessaire de tirer les lits pour passer l’aspirateur au niveau de la tête et de la plinthe.

Une salariée passe l'aspirateur sous le lit d'une chambre d'hôtel.

« Les pieds du lève-lit prennent la poussière à la longue et, sur du noir, ça se voit, nuance Ludivine Wauquier. On doit encore se pencher car on n’a pas, pour le moment, de plumeaux télescopiques pour les nettoyer plus facilement. Et les pieds contraignent également le passage de l’aspirateur sous le lit. » Mais de l’avis de toutes, le bénéfice s’avère largement supérieur à ces désagréments. Un soulagement pour Jessica Bruneau, directrice de l’établissement, qui n’était pas certaine lors de l’installation que ces lève-lits seraient rapidement adoptés. C’est elle qui a initié leur acquisition, avec l’accompagnement de la Carsat Hauts-de-France.

Exiguïté des chambres

« Constatant la sinistralité de l’établissement, nous avons demandé la réalisation d’une étude ergonomique par le service de prévention et de santé au travail, en particulier sur les postes des femmes de chambre, très exposées aux troubles musculosquelettiques, se remémore Véronique Watteel, contrôleuse de sécurité à la Carsat Hauts-de-France. Les chambres étant majoritairement petites, il semblait compliqué de les équiper de lève-lits, mais ça a pu être réalisé en adaptant les équipements à l’espace disponible. Nous avons alors accompagné l’hôtel pour l’aider à financer l’achat. » Le budget a avoisiné les 82 000 €.

« La directrice est à notre écoute, on peut faire remonter des besoins. »

La prise en compte des conditions de travail avait débuté il y a quelques temps. En prenant ses fonctions il y a sept ans, Jessica Bruneau avait constaté qu’un tiers de l’équipe partirait à la retraite dans les dix ans. Pour prévenir l’usure physique et les risques de désinsertion professionnelle, elle a décidé d’agir. « Les femmes et les valets de chambre font un métier essentiel dans un hôtel, ils ont une vraie technicité. Un établissement ne peut pas tourner sans eux, estime-t-elle. J’ai une vraie volonté de valoriser ces compétences qui sont parfois mal perçues, même par eux. » Cela se traduit entre autres par la mise à disposition d’outils de travail améliorant le quotidien.

DES PRESTATIONS RENDUES VISIBLES ET PERSONNALISÉES

« J’ai à cœur d’avoir une bonne ambiance de travail, conviviale, et que chacun se sente membre d’une seule et même équipe, explique Jessica Bruneau, directrice de l’hôtel. Il nous est arrivé d’avoir des commentaires négatifs de clients, qui confondaient propreté et vieillissement de l’établissement. Ça faisait mal au cœur alors que le travail était bien fait, et que s’ils avaient su qui l’avait fait, ils n’auraient peut-être pas été si durs. » Elle a alors décidé de rendre plus visibles ces travailleuses de l’ombre. Désormais, chaque femme de chambre dépose à la fin de son intervention une carte avec sa photo et quelques traits de caractère qui la décrivent, pour créer un lien avec les clients. Les retours s’avèrent très positifs. Les mots de remerciements laissés par les clients sont ensuite affichés sur un tableau à proximité de la salle de pause.

Les vestiaires ont ainsi récemment été entièrement rénovés. « Une journée ne peut pas bien commencer sans un environnement de travail agréable », remarque la directrice. Une salle de pause et de briefing, selon le moment de la journée, a également été réaménagée. Les rideaux de douche ont été remplacés par des vitres, simplifiant là aussi les tâches. Des cartes sont déposées par les femmes de chambre pour que les clients prennent connaissance de la personne qui s’en est occupée. Chacune a récemment été équipée de chaussures de sécurité, un EPI peu fréquent chez les femmes de chambre. « Comme on va vite et que les chambres sont petites, on se cogne facilement les pieds, commente encore Ludivine Wauquier. Ça limite aussi les risques de glissade dans les douches. C’est un vrai confort. » Ce sont d’ailleurs les femmes de chambre qui en ont fait la demande. « La directrice est à notre écoute, on peut faire remonter des besoins, elle les prend en compte », témoigne-telle encore.

Prévenir l'usure physique

Les huit femmes de chambre de l’hôtel s’occupent des chambres réparties sur les sept étages de l’hôtel. Elles ont en général chacune un étage dédié. Laurence David, gouvernante, organise et supervise leur activité. « Je tiens une fiche pour les retours de linges non conformes, explique-t-elle. Car lorsqu’il nous revient des draps tachés ou déchirés, et que l’on s’en rend compte une fois le lit fait, c’est un surplus de travail pour nos salariées. » Dans la dynamique de ces améliorations, d’autres aménagements sont en projet, toujours en suivant les préconisations de l’étude ergonomique. Il s’agira par exemple de mettre en place dans les offices des tablettes en hauteur pour faciliter le rangement des stocks. Un projet est également en cours pour acquérir des aspirateurs moins lourds, sans fil. Des essais ont lieu dans d’autres hôtels, avant un déploiement plus large. À travers tous ces projets, l’amélioration des conditions de travail n’en est qu’à ses débuts...

LIMITER LES PASSAGES

La pandémie de Covid-19 est venue bouleverser les usages et les pratiques dans l’hôtellerie. L’activité de l’hôtel Ibis Styles de Lille a mis du temps à retrouver son niveau d’avant 2020. En juin 2021, le taux d’occupation était d’environ 33 %. Les réservations tournent aujourd’hui à plein, grâce à des événements annuels comme la grande braderie de Lille ou les fêtes de fin d’année, ainsi que la récente coupe du monde de rugby et la perspective des Jeux Olympiques à l’été 2024. Parmi les changements d’organisation hérités de cette période, signalons le fait qu’il n’y a plus de recouche systématique. Lorsque les clients séjournent plusieurs nuits, leur chambre est refaite à leur demande, mais pas systématiquement chaque matin. Alors que les femmes de chambres nettoyaient de 18 à 22 chambres par jour avant 2020, la moyenne, avec cette organisation, est aujourd’hui d’une quinzaine de chambres par jour.

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