
Pour rejoindre la Scierie du Cabalet depuis Preuseville, en Seine-Maritime, on suit une petite route étroite, tout au long de laquelle des aires de croisement ont été aménagées pour permettre aux véhicules de se croiser. Sur place, des grumes côtoient des planches et des palettes, tandis que de l’autre côté de la route d’accès, une plate-forme bois-combustible de 13 000 m2 est largement alimentée par les connexes de la scierie. Si l’extérieur ne laisse aucun doute sur l’activité de l’entreprise, dans l’atelier qui jouxte les bureaux, la suprise vient des robots jaunes qui lancent leurs bras dans les airs, avec, à leur extrémité, des éléments de planches en tous genres. Il s’agit de la toute nouvelle ligne de production de palettes, dont l’objectif est de gagner en qualité, en productivité et de réduire le port de charge.
La Scierie du Cabalet a été créée en 1980, par Annicke et Michel Vigneau, une famille « dans le bois depuis 1780 ». À la mort soudaine de son beau-père en 1995, alors qu’il n’était pas du métier, Hervé Vassard vient travailler avec sa belle-mère. En 2012, avec sa femme, ils reprennent l’entreprise spécialisée dans l’exploitation forestière (achat de bois sur pied), la scierie et la fabrication d’emballages de type palettes et caisses. L’entreprise se fournit en essences exploitées localement, des feuillus (hêtres ou peupliers) et des résineux. Une entreprise avant tout familiale, de 18 salariés : « Pour ma part, je m’occupe de la partie commerciale mais aussi technique. Si un opérateur manque à l’appel, je peux tout à fait le remplacer, insiste le dirigeant, Hervé Vassard. Je connais le travail de production et ses contraintes. Je sais qu’une palette, c’est lourd à retourner, et qu’approvisionner une ligne à la main, ça peut, à la longue, faire mal au dos. »
Chaque année, 19 000 m3 de palettes sortent de l’entreprise. En fonction de leurs usages, elles pèsent de 8 à 60 kg. « Avant l’arrivée de la nouvelle ligne, on manipulait beaucoup les palettes, souligne Anthony Poyen, agent de production. Là, on a au moins divisé par deux le port de charges. Moi qui craignais d’être un peu dépossédé de mon savoir-faire, je m’y retrouve parfaitement : mes tâches sont plus agréables et plus variées. »
Des options en plus
« Hervé Vassard a sollicité la Carsat en 2021, se remémore Colette Périssé, contrôleuse de sécurité de la Carsat Normandie. Il voulait moderniser son outil de production tout en réduisant le port de charge, et en augmentant la productivité. » Ils signent ensemble un contrat de prévention, prévoyant une journée de formation aux risques professionnels pour le dirigeant et l’achat de systèmes automatiques de retournement de palettes, d’empilage de palettes et de plateaux, et d’alimentation des machines d’une partie de la ligne.
« Il avait une idée assez précise de ce qu’il voulait, souligne Colette Périssé. Le contrat lui a permis de prendre des options pour aller plus loin dans la réduction des manutentions. » Ainsi, la nouvelle ligne est alimentée, d’un côté, par des planches apportées par paquets puis dépilées par l’un des robots jaunes, encagé pour éviter tout contact avec la machine. Elles sont destinées à fabriquer le plateau de la palette, le dessus.

Des bacs métalliques, surplombant les machines et contenant les pointes pour clouer les palettes, sont régulièrement approvisionnés par les opérateurs. Pour cela, ils montent sur des passerelles et accèdent rapidement aux trois postes d’approvisionnement. « Certaines passerelles étaient en option, précise le dirigeant. Pour ne pas obliger les opérateurs à descendre et à remonter, j’ai opté pour des passerelles reliant tous les points d’approvisionnement. » Quand on sait qu’une palette nécessite environ 90 pointes, ça n’est pas rien.
Un peu plus loin dans l’atelier, c’est au tour des dés d’entrer en production : ces cubes de bois qui supportent les plateaux des palettes. S’ils sont en bois naturel, ils arrivent sous forme de barres de bois dites « barres à dés » pour alimenter automatiquement la ligne de découpe. « Avant, l’alimentation se faisait à la main avec, là encore, beaucoup de port de charge », souligne l’opérateur.
C'est la machine qui cloue
En revanche, si les palettes sont réalisées avec des dés compressés à partir de chutes de bois broyées (classe B), ils arrivent sous forme de cubes et l’alimentation de la ligne se fait en semi-automatique. « Aujourd’hui, seulement 10 % de nos clients demandent ce type de palettes. Il faudrait environ 50 % de palettes en dés compressés pour robotiser complètement l’alimentation. »
Du côté des semelles – le dessous des palettes –, le chargement se fait encore en partie à la main. « Avant, j’étais dépendant de la cadence de la machine. Désormais, explique Anthony Poyen, je charge, et c’est la machine qui se sert en planches pour finaliser la palette : clouer les semelles et réaliser le marquage à chaud avec le nom du client, la date de production et les mentions légales. » Lorsque la contrôleuse de sécurité s’étonne de la fumée qui s’échappe sur les bords de la hotte surplombant le marquage à chaud, Hervé Vassard réagit : « Tout est prévu : on a la hotte, le système d’extraction des fumées vers l’extérieur… il ne manque que le raccordement qui ne va pas tarder à arriver ! »
La Scierie du Cabalet a investi trois millions d’euros dans cette ligne de production. « Je suis dans l’entreprise depuis 43 ans, souligne Christophe Vallée, contremaître, je peux vous dire que ça change tout… notamment pour le dos. La prise en main de la nouvelle machine a été facile, nous avons été formés et accompagnés par le fabricant. Tout est plus simple à présent, y compris les changements de formats. » La nouvelle ligne a permis de faire face à une grosse commande de palettes, arrivée juste avant Noël. « Sans elle, cela aurait été compliqué de la préparer dans les temps. Nous aurions dû certainement revoir complètement les horaires de travail », assure le PDG qui a pris rendez-vous avec la contrôleuse de sécurité pour réfléchir aux conditions de travail de l’activité découpe de bois, ciblée TMS Pros.
FICHE D'IDENTITÉ
Nom : Scierie du Cabalet
Lieu : Preuseville (Seine-Maritime)
Activité : exploitation forestière, scierie et fabricant d’emballages de type palettes et caisses
Effectif : 18 personnes
Production : 19 000 m3 de sciage à palettes par an
Chiffre d’affaires (2023) : 8,3 millions d’euros