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Agroalimentaire

Déménager pour diminuer la pénibilité

La Biscuiterie de Chambord, dans le Loir-et-Cher, est en pleine expansion. Ce développement, qui passe par la construction d’un nouveau bâtiment, a été l’occasion de travailler en amont sur la conception des lieux et situations de travail. Objectif : diminuer la pénibilité à tous les postes.

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Corinne Soulay, 25/01/2023
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Un boulanger devant une plaque de biscuits cuits.

Tuiles aux amandes, cakes aux pommes, bouchées au chèvre… La Biscuiterie de Chambord, située à Maslives, à moins de 5 km du célèbre château de François 1er, propose près de 80 références, dont les traditionnels palets solognots, à base de pâte sablée, truffée de raisins macérés au rhum. Chaque année, 240 tonnes de biscuits sont produites et conditionnées dans cette petite usine du Loir-et-Cher. Des denrées sucrées ou salées vendues dans l’une des dix boutiques de la région – dont l’une attenante à l’unité de production – ou via des supermarchés locaux. Mais, depuis quelques années, la biscuiterie était à l’étroit. « Nous avons des demandes pour l’export et de la part d’épiceries fines, et nous ouvrons régulièrement de nouvelles boutiques : notre projet est d’atteindre 500 tonnes de production annuelle dans les cinq ans », s’enthousiasme le directeur général Jonathan Chigot. Conséquence : l’usine actuelle, sise dans deux anciens poulaillers transformés en laboratoire dans les années 1980 et couvrant 1 000 m2, ne suffisait plus.

Un nouveau bâtiment pour la biscuiterie

Dans la rue principale du village de Maslives, qui compte quelque 800 habitants, un nouveau bâtiment, flambant neuf, jouxte désormais l’établissement originel, d’où émanent des effluves caramélisés : 3 000 m2 dont l’aménagement a été pensé en détail, en amont. Tout est prêt pour l’installation définitive dans quelques semaines. « C’était l’opportunité d’améliorer les conditions de travail des salariés, souligne le directeur. Quand je suis arrivé en 2013, j’ai testé tous les postes, j’étais donc conscient de leur pénibilité, aussi bien chez les pâtissiers que chez les conditionneuses, qui emballent les biscuits à la main. En 2018, des médecins du travail de l’Association de prévention et de santé au travail (APST) du Loir-et-Cher sont venus faire des études de postes pour pointer les améliorations possibles et, dès le début du projet, nous avons été accompagnés par la Carsat Centre-Val de Loire. »

Au cœur des discussions : la conception des lieux et situations de travail. Toutes les surfaces ont été rationalisées afin qu’elles soient suffisamment vastes pour assurer une bonne ergonomie, mais sans excès, pour éviter les déplacements trop longs entre les ateliers. Un travail sur les flux a également été réalisé pour favoriser la marche en avant dans le process de fabrication, fluidifier la circulation et éviter le plus possible les croisements de flux. Des améliorations ont été prévues à chaque poste pour réduire au maximum la manutention manuelle, le port de charges lourdes, les postures contraignantes et les gestes répétitifs.

500 tonnes

de biscuits seront produits chaque année, contre 240 tonnes aujourd’hui.

« Dans ce cadre, nous avons signé un contrat de prévention avec l’entreprise qui a permis de prendre en charge de nouveaux outils et machines, notamment deux robots collaboratifs », précise Fabrice Lucas, contrôleur sécurité de la Carsat Centre-Val de Loire. Mais pour Jonathan Chigot, pas question de tout automatiser. « Nous sommes une biscuiterie artisanale et nous le resterons, argue-t-il. Pour tous les process qui touchent au produit – le dosage, le mélange, le pétrissage, le conditionnement – j’ai rejeté les dispositifs industriels. En revanche, porter des sacs de farine de 25 kg ou manipuler manuellement une cuve, en hauteur, pour verser la pâte dans la doseuse, ce n’était plus possible. Je suis convaincu qu’en réduisant la pénibilité, on va augmenter la productivité. »

Un investissement conséquent 

Concrètement, l’entreprise a investi 2 millions d’euros en matériels – en plus des 5 millions dévolus à la construction du bâtiment. Parmi les nouvelles acquisitions, des basculeurs de cuve automatiques, donc, mais aussi des transpalettes électriques, des tables ergonomiques, des tapis automatisés… ainsi que 80 chariots à hauteur constante. Car le transport des plaques de cuisson a été identifié comme l’une des situations les plus à risque : chaque plaque pèse 2,3 kg et l’opérateur doit les déplacer à bout de bras de la ligne de production à un chariot de 22 étages. Une manipulation délicate, nécessitant de se baisser ou, au contraire, de soulever la plaque pour atteindre le sommet du chariot. Un équipement à hauteur constante permettra de supprimer ces postures extrêmes et les cobots prendront la relève des opérateurs à différents endroits de la chaîne. « Toutes les plaques vont aussi être remplacées par des modèles en aluminium, deux fois moins lourds », ajoute Jonathan Chigot.

Pour l’heure, si la production n’a pas encore débuté dans le nouveau bâtiment, certaines machines sont déjà utilisées dans l’usine historique. Au conditionnement, par exemple, une formeuse de boîtes remplace le pliage à la main, et la machine de cerclage final, désormais actionnée par une pédale, élimine les gestes répétitifs qui étaient nécessaires pour actionner la précédente. Des améliorations minimes, comparées à celles qui attendent les opérateurs après le déménagement. « En matière de prévention et de sécurité, on est passé dans une autre dimension, confirme Fabrice Lucas. Même pour la maintenance, les risques ont été réduits : beaucoup d’équipements – comme la climatisation et les groupes froid – ont été installés au sol pour éviter les interventions en toiture. Les dispositifs de circulation de fluides – eau, électricité, air comprimé… – qui se trouvent en général au-dessus du plafond, nécessitant de se contorsionner pour intervenir, sont accessibles dans une salle technique où les opérateurs peuvent se tenir debout et travailler dans de bonnes conditions. »

Visite du nouveau site de production.

Ne reste plus qu’à finaliser le transfert de l’activité dans ce nouveau bâtiment et à faire les derniers ajustements. « Des formations sont prévues pour que les salariés s’approprient les nouveaux outils, notamment les cobots, déclare le directeur. Changer d’organisation ne peut se faire sans pédagogie. Nous allons également recruter dix nouveaux employés pour nous adapter à l’augmentation de la production. » En attendant, Jonathan Chigot s’attelle à charger son véhicule de dizaines de boîtes de palets solognots. En ce 26 nov-embre, il est attendu à Lamotte-Beuvron, à une cinquantaine de kilomètres, pour un rendez-vous important : l’inauguration d’une onzième boutique. « Et ce n’est pas fini, nous ouvrons bientôt notre nouvelle boutique, ici à Maslives, sur 400 m2, avec des visites touristiques industrielles pour découvrir la biscuiterie. Et une douzième est également prévue à l’été 2023 », conclut avec enthousiasme le dirigeant.

FICHE D'IDENTITÉ

Nom : La Biscuiterie de Chambord
Activité : fabrication artisanale de biscuits et cakes, vente en boutiques et en supermarchés
Lieu : Maslives (Loir-et-Cher)
Effectif : 48 salariés, dont 18 en production (pâtissiers, conditionneuses…), 10 en administratif, 20 vendeurs et vendeuses en boutiques
Chiffre d’affaires : 6,5 millions d’euros

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