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Tir sportif

Le plomb et le bruit sont dans le viseur

Les munitions pour armes à feu sont génératrices de particules de plomb auxquelles les salariés de stands de tir sportif peuvent être exposés. EG-CZ Academy, qui a ouvert ses portes à Quimper, s’est dotée d’une ventilation visant à réduire la présence de ce polluant dans ses locaux qui ont été conçus pour épargner les oreilles de l’équipe comme des clients.

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Damien Larroque - 30/01/2023
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Un homme tire dans un stand de tir.

La pratique du tir sportif est régie par une stricte législation dont l’objectif est à la fois de s’assurer d’une utilisation en sécurité des armes à feu, mais aussi d’éviter que celles-ci ne se retrouvent entre de mauvaises mains. Au-delà du risque de blessure par balle, les tireurs les plus assidus comme les professionnels des stands de tir sont soumis à une menace moins évidente, mais tout aussi réelle : l’exposition au plomb. En effet, les munitions sont composées d’une douille remplie de poudre et d’un projectile appelé ogive, composé tout ou partie de plomb. Des particules du métal toxique sont donc relâchées dans l’atmosphère après chaque pression de la détente, les plus légères restant en suspension tandis que les plus lourdes se déposent sur les surfaces.

Des munitions et du plomb

Éric Grauffel, septuple champion du monde de tir sportif de vitesse (TSV), est particulièrement conscient de cette question. Les 150 000 munitions qu’il utilise annuellement pour les entraînements et les compétitions ont fait monter de manière chronique le taux de plomb dans son organisme. Aussi, lorsqu’il se lance dans la création à Quimper de l’EGCZ Academy, stand de tir indoor dédié à la pratique de trois disciplines à l’arme de poing (TSV, fun shoot et tir à 25 mètres), c’est bien évidemment avec une oreille attentive qu’il accueille les recommandations du Centre interrégional de mesures physiques de l’Ouest (Cimpo) de la Carsat Bretagne en matière de ventilation.

« France Blanchard, de l’inspection du travail, a attiré notre attention dès le début du projet. Il nous a ainsi été possible, en nous appuyant notamment sur des simulations informatiques réalisées à partir des plans du bâtiment, de prodiguer nos conseils au fabricant afin que les performances du matériel fourni soient en adéquation avec une évacuation efficace des polluants », indique Laurent Legal, ingénieur-conseil au Cimpo. « Un travail d’équipe s’est mis en place entre les différents acteurs du projet, confirme Jean-Michel Lamy, co-fondateur de l’EG-CZ Academy, tireur lui aussi. L’architecte, notamment, a su adapter son travail aux contraintes qu’imposait notre volonté de sécurité. »

Armes à feu, armes à bruit

À la livraison du nouveau batiment, en septembre 2022, des tests avec fumigènes et des mesures aérauliques ont été réalisés par le Cimpo. Les résultats ont montré que le dispositif de ventilation, alimenté par quatre centrales, respectait ses recommandations en termes de débit et de vitesse, malgré quelques phénomènes de turbulence autour des obstacles comme les portes-cibles. En tout état de cause, même à deux mètres d’un tireur, on ne sent pas la poudre… « Il faut tout de même s’assurer que les expositions sont bel et bien limitées, précise Gilles Mauguen, contrôleur de sécurité à la Carsat Bretagne. Pour ce faire, des mesures surfaciques et au niveau des voies respiratoires des salariés seront menées début 2023. » En cas de résultats décevants, des réglages seront faits sur la ventilation et, le cas échéant, des mesures complémentaires devront être définies. « Nous avons demandé l’installation d’une zone pour se nettoyer les mains avant la sortie du stand, ce qui n’était pas prévu sur plan, explique Laurent Legal. Mais si du plomb est trouvé à l’accueil, par exemple, il faudra revoir l’organisation pour empêcher ces contaminations. »

1 million d’euros

ont été investis dans la ventilation pour limiter les expositions au plomb.

Les déflagrations des armes à feu pouvant largement dépasser les 160 dB(C), elles sont aussi très dangereuses pour l’audition. Si le port d’un casque anti-bruit est obligatoire pour pénétrer dans le stand, un travail important a néanmoins été mené en matière d’acoustique. Et ce, en dépit des contraintes liées à l’activité de tir qui proscrit l’utilisation de certains matériaux. En effet, les parois doivent empêcher les ricochets mais également s’opposer au maximum à la formation d’éclats d’ogives, particulièrement dangereux pour les yeux même si les lunettes de sécurité sont elles aussi obligatoires.

Pour réduire le bruit, une couche de 20 cm de laine de roche recouverte par des plaques de 3 cm de laine de bois condensée - qui, comme les tirs tests l’ont montré, absorbent littéralement les projectiles - a été préférée aux classiques tôles perforées. Pour les mêmes raisons, le sol est en matière synthétique identique à ce que l’on peut trouver sur les aires de jeux, mais d’une densité plus élevée. Quant aux différentes portes qui donnent accès au stand, elles sont blindées et doubles (métalliques à l’extérieur, en bois à l’intérieur), pour interdire aux ogives comme au bruit de fuiter.

Le local technique du stand de tir EG-CZ Academy.

Le local technique qui accueille les centrales de la ventilation, situé au-dessus du stand de tir, a lui aussi bénéficié d’un traitement acoustique. Murs et plafond sont recouverts de laine de roche cachée par des plaques de tôle perforée. En plus, des pièges à bruit équipent les canalisations. Ces dispositifs bloquent la propagation à travers le circuit des vibrations dues aux coups de feu. « Des grilles donnant sur l’extérieur assuraient dans un premier temps l’apport d’air mais, même si les normes de bruit étaient respectées pour le voisinage, nous voulions aller plus loin. Elles ont été remplacées par des volets automatiques qui assourdissent davantage les ondes sonores », souligne Jean-Michel Lamy. Que ce soit dans le local technique ou dans le stand, des tests du Cimpo ont validé l’efficacité des différents traitements acoustiques.

« C’est vraiment de la belle ouvrage. Il va d’ailleurs être proposé pour recevoir une distinction Acanthe remise par la Carsat Bretagne aux bâtiments intégrant la prévention à la conception », conclut Gilles Mauguen.

FICHE D'IDENTITÉ

Nom : EG-CZ Academy
Activité : stand de tir
Lieu : Quimper (Finistère)
Superficie : 2 000 m2 au sol dont 1 500 de stand
Effectif : 3 salariés

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