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Travaux de peinture

La santé et la sécurité au travail chevillées au corps

Équipements de protection collective dernier cri, formations régulières… L’entreprise Peintures Schmitt, en Alsace, ne compte que trois salariés, mais son gérant, Michel Schmitt, ne lésine pas sur la prévention des risques professionnels.

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Corinne Soulay - 19/07/2023
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Christian Schmitt lors d'une opération de peinture.

Un café, à la pause sur le chantier : c’est le rituel quotidien pour les salariés des Peintures Schmitt, entreprise spécialisée dans les travaux de peintures extérieures et intérieures à Sainte-Croix-en-Plaine, dans le Haut-Rhin. « Chez les artisans, le dialogue social c’est tout le temps !, plaisante Michel Schmitt, le gérant de 66 ans. Communiquer, partager des moments de convivialité… C’est par là que commence l’amélioration des conditions de travail. » Au-delà de la boutade, l’homme – qui a repris avec son frère l’affaire paternelle, en 1984 – considère, depuis longtemps, la prévention comme une priorité.

Le tournant a eu lieu en 1998. À l’époque, Michel Schmitt vient d’être nommé président de la corporation des peintres du centre Alsace et un délégué de l’OPPBTP le sollicite : « Il voulait voir ce qu’on pouvait faire ensemble pour la profession, se souvient le chef d’entreprise. Il s’intéressait à nous car nous avions acquis une nacelle hydraulique pour sécuriser les travaux. C’était une première pour une entreprise de peinture. Nous avions déjà une sensibilité prévention sans avoir connaissance des aides et du réseau. » Michel Schmitt découvre alors les offres de l’OPPBTP en termes d’accompagnement, de formation… et en fait part à la corporation.

Petit à petit, il prend conscience de l’existence du réseau de prévention et entame une étroite collaboration avec ses différents acteurs : Carsat, services de prévention et de santé au travail, inspection du travail... « Avec eux, j’ai compris que mon rôle, en tant que président, était de faire baisser les accidents du travail dans la profession. Mais, pour convaincre les collègues, je devais être exemplaire », raconte-t-il. En 2001, il s’attelle à son document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) en lien avec la Carsat et l’OPPBTP, et se lance dans l’analyse du risque chimique avec l’aide du médecin du travail…

60 à 70 chantiers par an sont réalisés par l’entreprise.

Au fil du temps, l’entreprise progresse. Son frère, Christian, est nommé chargé de prévention dans l’entreprise. Les Schmitt arpentent régulièrement les salons professionnels pour dénicher les dernières innovations en matière de protection collective. En 2005, ils investissent ainsi dans une nouvelle nacelle, dotée de stabilisateurs hydrauliques. Les recommandations préconisent de substituer les produits dangereux ? Ils opèrent un virage à 180° et remplacent la plupart de leurs peintures contenant des solvants – dont certains sont cancérogènes – par des peintures à l’eau. Et tant pis si cette décision génère un surcoût et des répercussions sur leur activité. « Auparavant, nous travaillions pour divers clients – marchés publics, communes, promoteurs… –. À partir de là, nous avons dû nous concentrer sur les particuliers, décrit le gérant. Nous ne le regrettons pas : nous marchons au bouche-à-oreille, donc si des clients viennent à nous, c’est qu’ils acceptent notre façon de travailler, et nous n’hésitons pas à refuser un chantier si les conditions de sécurité ne sont pas réunies. »

Autre étape importante : la publication, en 2010, de la norme ISO 26 000, relative à la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). « Nous avons obtenu la plus haute évaluation dans ce domaine, se réjouit Michel Schmitt. Pour moi, la prévention c’est général, cela comprend les risques professionnels, chutes, risque chimique, RPS…, mais aussi le risque économique – faire qu’une entreprise soit pérenne –, le risque environnemental et social. » L’atelier de 340 m2 reflète ce souci d’exemplarité. Ici, pas de tache de peinture : le sol, rénové il y a pourtant plusieurs années, est immaculé. Malgré l’effectif réduit (trois salariés), un marquage y a été apposé dans la zone de stockage des échafaudages, pour éviter les collisions engin-piéton lorsqu’on y fait entrer la remorque.

Exceptionnel pour une TPE

Un espace carrelé est dédié au lavage des rouleaux, qui s’exposent par dizaines, comme neufs, alignés au mur. Une station de nettoyage y a été aménagée, digne de celles utilisées dans l’industrie. « Il suffit de déposer le rouleau à l’intérieur pour qu’il soit lavé automatiquement, ce qui réduit les manipulations et le contact avec la peinture, explique Christian Schmitt, en alliant le geste à la parole. Les eaux usées transitent ensuite dans un débourbeur, muni d’un filtre coalesceur, une sorte de mini-station d’épuration qui permet de séparer les résidus de peinture, qui seront ensuite éliminés via une filière de traitement des déchets industriels dangereux. »

À côté, la pièce de stockage des produits dangereux et de préparation de peinture a été conçue dans le cadre d’un projet commun avec la Carsat, l’OPPBTP, l’inspection du travail et l’Agence de l’eau pour prévenir le risque d’explosion, le risque chimique, mais aussi la pollution. Même chose pour la pièce abritant les déchets (pots de peintures usagés…). Mise à la terre des équipements, éclairage antidéflagrant, bac de rétention, captage des vapeurs, porte coupe-feu… « Un tel niveau de sécurité, c’est exceptionnel pour une TPE, souligne Alain Jung, ingénieur-conseil à la Carsat Alsace-Moselle. Et c’est pareil sur les chantiers. »

Christian Schmitt dans la station de nettoyage automatique des pinceaux et rouleaux.

Direction Eguisheim, commune aux maisons à colombages multicolores, élue « village préféré des Français ». L’entreprise y a deux chantiers de rénovation en cours, les premiers de l’année en extérieur. « Du 1er novembre à Pâques, nous nous cantonnons à des activités en intérieur, car les conditions climatiques ne sont pas appropriées », justifie Michel Schmitt. Deux compagnons, salariés de l’entreprise, repeignent la façade d’une demeure médiévale.

L’échafaudage, doté de garde-corps sécurisés – avec lisses, sous-lisses et plinthes, pour éviter les chutes de matériel – épouse parfaitement les contours de la maison. « Tous nos salariés sont formés au montage-démontage d’échafaudage, et disposent du Caces (NDLR : certificat d’aptitude à la conduite d’engins en sécurité) pour la conduite de la nacelle et de l’habilitation électrique… Ils sont également tous sauveteurs secouristes du travail (SST), précise-t-il, avant de lancer : Qui ne se forme pas se déforme ! »

La veille, le quotidien Les Dernières nouvelles d’Alsace avait justement repris cette formule pour titrer un article consacré à Michel Schmitt : le maître-peintre vient d’être décoré de l’Ordre national du Mérite. Une consécration parmi d’autres pour celui qui compte notamment un trophée de l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail (EU-Osha) et une page consacrée à son entreprise dans un manuel scolaire… En tournant les pages de l’ouvrage destiné à la filière STMG, on découvre d’ailleurs un portrait de lui et Christian. « Je n’aurais pas pu faire tout ça sans mon frère, qui m’a suivi dans tous mes projets », conclut Michel Schmitt.

FICHE D'IDENTITÉ

Nom : Peintures Schmitt Hubert & Fils
Activité : peinture intérieure et extérieure de bâtiments, essentiellement des chantiers de rénovation de particuliers
Lieu : Sainte-Croix-en-Plaine (Haut-Rhin)
Surface des locaux : 340 m2
Chiffre d’affaires : 340 000 euros

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