
Dans les bureaux du quartier d’affaires de La Défense, dans les sièges sociaux de Chanel, du Crédit Agricole ou de Thalès, dans certains aéroports français et bientôt dans les nouvelles gares du Grand Paris… Levez les yeux, vous apercevrez sans doute quelques-unes des réalisations de l’entreprise Échame, créée il y a 40 ans, et située à Linselles, dans le Nord. Son cœur de métier ? La conception et la fabrication de plafonds métalliques pour le secteur du bâtiment. Avant de sortir de l’usine, ces panneaux, lisses ou parés de perforations, blancs immaculés ou colorés, suivent un process en plusieurs étapes.
Réceptionné le plus souvent sous forme de bobine, le métal est d’abord coupé aux bonnes dimensions, puis poinçonné, plié, façonné, voire soudé, et peint, avant d’être garni de matériaux aux propriétés diverses (acoustique…) et emballé avant expédition. Une activité qui expose les travailleurs à différents risques professionnels, en particulier le risque chimique et ceux liés aux manutentions et au port de charges. Afin de les réduire, l’entreprise a, depuis longtemps, mis en place des mesures de prévention, à chaque étape, en fournissant notamment des aides techniques à la manutention.
Cap sur l’atelier de 5 000 m2, organisé selon le principe de la marche en avant, pour optimiser la circulation. D’abord, pour transférer les bobines d’acier de la zone de stockage à la dérouleuse, les opérateurs se servent d’un pont roulant, puis les tôles découpées sont superposées sur des palettes et transportées de machine en machine – cisaille, poinçonneuse, planeuse, plieuse, panneauteuse… – via des chariots élévateurs. Tous les opérateurs ont été formés à la conduite de ces engins, dotés d’un spot diffusant au sol une lumière bleue pour avertir les piétons de leur présence.
Dans la zone suivante, dédiée à la peinture, la ligne est automatisée, avec un système de convoyage suspendu sous balancelles et de buses mobiles qui projettent de la poudre polyester dans un environnement protégé. Et pour réduire les postures contraignantes, à la dernière étape de l’emballage, les salariés utilisent une filmeuse et une cercleuse automatiques. Voilà pour les mesures « historiques ».
S'adapter à l'évolution de l'activité
Mais, ces dernières années, des changements ont eu lieu, et il a fallu s’adapter. « Grâce à notre bureau d’études de conception et nos poinçonneuses à commande numérique, qui peuvent réaliser des perforations décoratives ou découper des pièces suivant des tracés spéciaux, nous pouvons faire du sur-mesure et répondre à des demandes spécifiques, en particulier d’architectes, explique Jean-Baptiste Marescot, le directeur commercial et marketing. Depuis environ cinq ans, en plus des plafonds modulaires, nous proposons aussi des panneaux de cloisons et des habillages décoratifs en métal, qui représentent aujourd’hui respectivement entre 10 et 30 % de notre activité. ».

Pour accompagner cette diversification, l’entreprise a réalisé une série d’investissements, qui ont conduit notamment à compléter l’arsenal de prévention. Car, jusqu’à maintenant, les panneaux de métal destinés au plafond mesuraient au maximum 4 m de long, et n’excédaient pas 0,7 mm d’épaisseur. Or, désormais, le format des pièces peut être plus important et leur épaisseur peut atteindre jusqu’à 3 mm. Résultat : elles sont plus difficiles et plus lourdes à manipuler.
Des poinçonneuses numériques plus modernes sont ainsi venues remplacer les deux anciennes, et une nouvelle, à chargement automatique, a été ajoutée. Pour David, le chef d’équipe, qui arrive justement au volant d’un chariot sur lequel sont empilées de longues plaques argentées, pas de manipulation manuelle donc : il approche l’engin de la machine, lève les fourches, dépose son chargement sur le tapis, programme la tâche à effectuer sur un écran et, quelques minutes plus tard, vient le récupérer de la même façon pour l’acheminer vers les plieuses.
Autre poste impacté par l’évolution de l’activité : celui dédié au façonnage. « Pour réaliser des pièces spécifiques ou des assemblages d’éléments préfabriqués, des opérateurs doivent intervenir manuellement pour des opérations de meulage, de soudure, de cintrage…, décrit Clément Antoine, le responsable technique. Traditionnellement, ils travaillaient sur un poste fixe, ce qui est adapté pour les petites pièces, pas pour des formats moins classiques. »
Actuellement, l’équipe s’attelle à la mise en forme d’imposants éléments de raccords cintrés, sortes de voûtes de métal destinées à la décoration d’une nouvelle gare du Grand Paris. « Cela nous a poussés à investir dans une “soudeuse volante”, déclare Jean-Baptiste Marescot. Avec ce système, la pièce à assembler reste fixe et le poste de soudure se déplace autour, de façon assistée, pour réduire au maximum les contraintes physiques. »
Un contrat de prévention
Les changements les plus conséquents sont intervenus sur la ligne de peinture, où un poste a tout bonnement été supprimé. Retour en 2019 : à l’époque, avant d’être peints, les panneaux étaient dégraissés à la main, pièce par pièce, par un opérateur, puis séchés au four. « Il s’agissait de nettoyer l’huile déposée, en amont, pour favoriser les opérations de perforations, explique Jean-Baptiste Marescot. C’était un poste pénible, car la personne faisait ça au chiffon toute la journée . Et, du point de vue de la qualité, il pouvait rester des traces qui jaunissaient à la chaleur du four. »

L’entreprise sollicite alors la Carsat Hauts-de-France pour l’achat d’un tunnel lessiviel. L’occasion pour le contrôleur de sécurité de la caisse de repérer d’autres points de progression et de proposer des solutions, subventionnées en partie par un contrat de prévention. « Nous nous sommes aperçus qu’après avoir été filtré, l’air était rejeté à l’intérieur du bâtiment, note Sylvain Vaniscotte, contrôleur de sécurité au Centre de mesures physiques de la Carsat Hauts-de-France, qui a accompagné l’établissement, en réalisant notamment des mesures de qualité de l’air. Cela a été l’occasion pour l’entreprise de mettre en place une ventilation avec rejet extérieur. »
Par ailleurs, si la ligne automatisée convient pour peindre la plupart des pièces, pour certaines, spécifiques, comprenant des parties difficiles d’accès ou produites en faibles quantités dans une teinte particulière, la mise en peinture nécessite d’être réalisée manuellement. Jusqu’en 2022, cette opération se faisait au pistolet, sans zone dédiée, le salarié uniquement protégé par des EPI (combinaison, masque…). Le contrat de prévention a permis l’acquisition d’une micro-cabine de peinture, avec aspiration par le bas pour garantir la sécurité du salarié. « Le dispositif permet en outre le recyclage de la poudre perdue, qui est retraitée avant d’être réutilisée », se réjouit Jean-Baptiste Marescot.
Rationaliser l'espace
« Nous sommes dans une logique d’amélioration continue, insiste Gaëtan Dalle, le directeur général d’Échame. Pour nous, il s’agit d’investir de nouveaux marchés donc de répondre à la fois à des exigences de qualité et de productivité, tout en assurant de bonnes conditions de travail pour nos salariés. » Preuve que les investissements se poursuivent, une nouvelle machine a été récemment réceptionnée. Installée entre les poinçonneuses et la panneauteuse automatique, cette presse à tablier permet de réaliser des pliages sur des pièces imposantes tout en laissant la tôle à plat, évitant ainsi aux opérateurs de la manipuler. Elle devrait être mise en service au premier semestre 2025, après formation des salariés.
Et cette logique d’amélioration continue ne bénéficie pas seulement à l’atelier. Prochain projet : réaménager intégralement les bureaux, pour l’heure cloisonnés et répartis sur tout l’étage. « Nous avons mené une réflexion en amont pour rationaliser l’espace, explique Gaëtan Dalle. L’objectif est d’avoir d’un côté une zone dédiée aux bureaux, partagée entre l’administratif, le bureau d’études et le commerce, pour favoriser les interactions. Le bureau d’études, qui se situe aujourd’hui au bout du couloir, sera par ailleurs rapproché des escaliers pour faciliter les échanges avec l’atelier. L’autre partie sera dévolue aux espaces de sociabilité, avec notamment la salle de réunion et la création d’une grande salle de pause confortable. » Fin des travaux prévue pour octobre 2025.
FICHE D'IDENTITÉ
Nom : Échame
Lieu : Linselles (Nord)
Activité : conception et fabrication de plafonds, d’habillages et de cloisons métalliques sur mesure pour le secteur du bâtiment
Nombre de salariés : 41 (26 dans l’atelier, 15 dans les bureaux)
Chiffre d’affaires : 7 millions d’euros