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Production de boissons

Quand l’industrialisation a du bon

À la faveur d’un déménagement de Paris à Ivry-sur-Seine, dans le Val-de-Marne, Ferment Station a entamé l’industrialisation de sa production de kéfir. En s’appuyant sur les conseils et le soutien financier de la Cramif, la TPE a réduit les expositions de ses salariés aux troubles musculosquelettiques, aux produits chimiques ou encore aux chutes de hauteur comme de plain-pied.

5 minutes de lecture
Damien Larroque - 01/04/2025
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Un dépalettiseur de bouteilles acquis en 2023 supprime les gestes répétitifs et les postures contraignantes qu’il fallait adopter pour dépoter les contenants manuellement.

Fondée en 2019, Ferment Station élabore des boissons fermentées légèrement pétillantes, produites à partir d’un levain, de culture de bactéries et de levures encapsulées dans une matrice de polysaccharides : les grains de kéfir. Breuvage traditionnel que l’on retrouve dans différentes cultures autour du globe. « Si, à titre personnel, je fais du kéfir depuis mes treize ans – les parents d’un ami m’avaient donné des grains –, c’est à la suite de notre premier projet entrepreneurial commun en 2018, qu’avec mon associé Benjamin Abrat, nous avons eu l’idée d’en faire un business, se remémore Nicolas Pradignac, l’un des deux dirigeants de la TPE. Nous commercialisons neuf recettes de kéfirs de fruits – il en existe concoctées à base de lait – conditionnées en bouteilles de 33 et 75 cl. » Le succès est au rendez-vous puisque de 900 litres par semaine au début de l’aventure, Ferment Station est passée à 7 200 litres hebdomadaires en 2024.

Dans un premier temps, sélectionnée par la mairie de Paris, l’entreprise s’installe dans un hôtel industriel du XIXe arrondissement de la capitale. Alors seuls aux commandes, les deux associés se rendent vite compte que les locaux de 100 m2 situés au deuxième étage de l’immeuble ne sont pas adaptés à leur activité. Le monte-charge est souvent en panne, obligeant à emprunter celui situé à l’autre bout du bâtiment et à manœuvrer le tire-palettes dans des couloirs exigus. Le passage régulier de l’engin creuse des irrégularités dans le sol, sources de potentielles chutes de plain-pied et d’éventuels renversements de palettes. Et l’absence d’évacuation au sol de l’atelier ne laisse d’autre choix que de pomper les effluents liquides de la production dans un évier, solution dont l’efficacité toute relative laisse planer le risque de glissade.

Aller plus loin en prévention

Les entrepreneurs prennent donc la décision de déménager à Ivry-sur-Seine, dans le Val-de-Marne, dans un bâtiment industriel de plain-pied de 600 m2. « C’était non seulement l’occasion de corriger les défauts du premier site, mais aussi celle d’aller plus loin en prévention, souligne Jean-Pierre Depay, contrôleur de sécurité à la Cramif, que l’entreprise a sollicitée début 2022 pour bénéficier de ses conseils. Nous avons réalisé l’évaluation des risques et travaillé sur les équipements, les flux et l’aménagement des nouveaux locaux. L’une des priorités s’est avérée être la ligne d’embouteillage 100 % manuelle et génératrice de troubles musculosquelettiques. » L’entreprise mise sur l’automatisation pour diminuer les gestes répétitifs. Aujourd’hui, un convoyeur conduit les bouteilles vides jusqu’à une étiqueteuse puis à des dispositifs de rinçage, de remplissage et de capsulage.

En parallèle, d’autres améliorations, en partie financées par un contrat de prévention signé avec la Cramif, voient le jour. Du côté de la production, un mélangeur de 800 litres alimente en sirop – composé de sucre, figues et jus de citron – la cuve de fermentation par le biais d’un tuyau. Avant, les salariés utilisaient un escabeau pour atteindre le sommet de la cuve de préparation, avec les risques de chute de hauteur que cela comportait. À l’expédition, grâce à une filmeuse automatique, fini les positions contraignantes qu’imposait l’emballage des palettes. Et pour finir, également inclus dans le contrat de prévention, le revêtement de sol antidérapant et les évacuations. Ces dernières ont posé question car le propriétaire du bâtiment refusait que le sol soit creusé. Ferment Station a dû se résoudre à couler une dalle surélevée pour intégrer les canalisations.

Grâce à la station  de nettoyage en place, le lavage de l'outil de production ne nécessite plus que de rares manipulations de produits chimiques.

« Il y a donc une marche entre la partie production/embouteillage et le stockage, ce qui n’est pas optimal. Toutefois, en mettant dans la balance les risques de chute de plain-pied très importants sans évacuation des liquides, cela reste une vraie amélioration, estime Jean-Pierre Depay. D’autant que ce dénivelé imposait de déposer les bouteilles vides sur la dalle puis d’avoir recours à un tire-palette pour les rapprocher de l’entrée de la ligne d’embouteillage. Aujourd’hui, tout est plus simple grâce au dépalettiseur acquis en 2023, avec l’aide d’un second contrat de prévention. »

Lavage automatique

En effet, il suffit de placer les palettes de bouteilles vides sous un astucieux préhenseur, constitué de boudins gonflables, capable de soulever simultanément toutes les bouteilles d’un étage, soit 330 bouteilles de 33 cl ou 203 de 75 cl. Cela supprime non seulement les manutentions pour monter la palette sur la dalle, mais aussi les gestes répétitifs et les postures contraignantes qu’il fallait adopter pour dépoter les contenants manuellement.

12 400 litres de kéfir par semaine, c’est l’objectif de production que s’est fixé Ferment Station pour fin 2025.

Le second contrat de prévention a aussi permis d’automatiser le lavage des cuves avec une station de nettoyage en place (NEP). La seule manipulation subsistant consiste à remplacer dans la NEP les bidons vides de produits acides et basiques par des contenants pleins environ une fois par mois. Il suffit ensuite de lancer le programme de lavage souhaité (ensemble de l’installation, seulement le fermenteur, les cuves de garde uniquement…) à l’aide du tableau de bord tactile. Pour le décrassage du sol, c’est une autolaveuse compacte qui remplace la brosse et l’huile de coude. « Nous avons radicalement changé nos conditions de travail, se félicite Nicolas Pradignac. Mais nous n’allons pas nous arrêter en si bon chemin. Nous avons identifié une machine pour automatiser la mise en carton. Lorsque nous l’aurons intégrée, le dernier poste manuel de la ligne sera la palettisation des colis. Si, pour le moment, nous n’avons pas trouvé de solution satisfaisante, nous restons en veille. » 

FICHE D'IDENTITÉ

Nom : Ferment Station
Lieu : Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne)
Activité : production de kéfir
Effectif : 7 salariés plus des alternants
Chiffre d’affaires : 1 million d’euros en 2024
Superficie : 600 m2

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