Gants, casque avec écran facial, trois types de combinaisons selon le risque, vêtements de travail haute visibilité… alignés sur une des tables de la salle de réunion, ces équipements nous sont présentés par l’équipe d’encadrement de SARP SEAV, qui nous met à contribution pour tester les gants dernière génération, particulièrement souples et offrant une bonne préhension. La prévention des risques professionnels n’est pas traitée à la légère dans cette entreprise spécialisée dans l’assainissement.
SARP SEAV, filiale de SARP Veolia, propose le curage de canalisations, l’entretien de fosses septiques et bacs à graisse, le débouchage d’urgence, les services industriels et pétroliers, les diagnostics réseaux… Selon l’intervention, les 20 agents de l’agence de Draguignan disposent d’une flotte de véhicules allant du camion hydrocureur de 32 tonnes au véhicule léger (4 x 4). Les interventions se font le plus souvent à deux, selon un planning établi la veille pour le lendemain, les urgences faisant partie du quotidien.
« Les risques lors des interventions de nos équipes sont nombreux, évoque Rémi Barone, coordinateur HSEQ (hygiène, sécurité, environnement, qualité) : il y a bien sûr le risque biologique, lié aux matières organiques que l’on évacue, mais celui occasionné par la circulation automobile est plus prégnant. » Viennent ensuite le risque d’intoxication lié aux émanations de gaz, le risque chimique lié aux produits corrosifs que les particuliers peuvent déverser dans les canalisations mais aussi les produits pompés chez des clients industriels. Sans oublier les risques associés au travail en hauteur, les troubles musculosquelettiques et ceux liés à l’usage de la haute pression.
Un dispositif télécommandé
Pour les illustrer, nous suivons Alain Sablon, sur une première intervention. Il connaît parfaitement le terrain, ayant lui-même occupé tous les postes, avant d’être responsable d’exploitation. Sur un rond-point, Fanny Lefloc’h et Nicolas Fossi, chauffeurs opérateurs, sont en cours d’intervention. « On a dû demander un arrêté d’urgence pour travailler sur la voirie, explique Alain Sablon. On a de la chance, l’accès au rond-point est constitué d’une double voie, il en reste une pour le trafic routier. » Il n’empêche, c'est le milieu de la matinée et une longue file de voitures s’est formée. « On voit que le risque lié à la circulation est majeur, souligne Éric Dumont, contrôleur de sécurité à la Carsat Sud-Est. Ils ont cependant bien protégé le chantier avec des cônes et le camion. »
ACCUEIL
Les personnes embauchées suivent un parcours d’intégration d’un mois qui commence par la diffusion d’un film de 10 minutes environ, réalisé au niveau national mais montrant bien l’activité réelle et les risques professionnels. À l’issue du visionnage du film, le nouvel arrivant doit remplir un questionnaire présentant 20 situations de travail et les risques associés. La correction se fera avec son responsable.
Les opérateurs viennent de sortir par aspiration, un bloc de pierre. « La canalisation se bouchait régulièrement, on en a identifié la raison », remarque Nicolas Fossi. Que ce soit pour l’utilisation de l’eau sous pression ou l’aspiration, l’un des opérateurs manipule la télécommande qui actionne le dispositif, tandis que l’autre dirige le tuyau. À tout moment, celui qui tient la télécommande peut stopper l’opération.
Sur ce chantier, pour éviter la contamination par les agents biologiques par contact cutané ou projection, les deux intervenants sont équipés de gants, chaussures de sécurité, vêtements de travail, protection auditive, casque avec écran facial et d’un détecteur de gaz (H2S, CO, O2 et limite inférieure d'explosivité). Certes, nous sentons l’odeur des matières organiques, mais nous n’en verrons pas. « Il est rare que nos agents soient en contact direct avec elles, souligne le responsable HSEQ. En effet, sauf pour les stations d’épuration, nos interventions se font à l’aide de tuyaux reliés au camion. » Les flexibles, dont les diamètres et buses associées sont variables, permettent d’envoyer soit des caméras dans des conduits pour effectuer un état des lieux, soit de l’eau à haute pression pour déboucher les canalisations puis faire remonter les matières qui obstruent les canalisations.
À l’issue de l’intervention, une fois les tuyaux enroulés, les agents lavent les mains au savon liquide et à l’eau. Tous les nouveaux camions sont équipés d’un point d’eau et de savon. Les gants et autres EPI sont rangés dans un compartiment spécifique, sur le côté du camion. Fanny Lefloc’h se charge de remettre la plaque d’égout en place. « Nous avons des outils pour soulever la plaque, mais pas pour la transporter », reconnaît Alain Sablon.
Tester avant d’utiliser
Deuxième intervention, en centre-ville, avec un véhicule léger, plus adapté à la densité urbaine. Les plots signalant le chantier n’empêchent pas les piétons de passer. Le responsable d’exploitation, conscient du problème, va faire acheter des poteaux pour installer des rubans et mieux délimiter le chantier. « Vous ne voyez rien dans le trou ? C’est normal, ça se situe au fond. C’est tout bouché… », s’amuse Timothé Levillain, chauffeur opérateur. Il prend une première photo de l’état initial, puis déroule le tuyau relié à la cuve du camion. Il porte le même équipement que l’autre équipe, mais avec, en plus, des bouchons d’oreilles. « Timothé teste de nouveaux bouchons d’oreilles moulés, avec des petites poignées pour les enlever, pour des raisons d’hygiène, explique le responsable HSEQ. Nous mettons toujours en test nos équipements avant de les généraliser. »
FORMATIONS
Titulaire d’un permis poids lourd, le nouvel embauché doit, à son arrivée, suivre les formations suivantes :
- parcours d'intégration avec tutorat (durée minimum 1 mois, en interne);
- haute pression (2 jours, par un organisme);
- travail en espace confiné (Catec) (2 jours, par un organisme extérieur);
- travail en hauteur (2 jours minimum par un organisme extérieur);
- geste et postures (1 jour par organisme extérieur);
- SST, cette dernière formation étant facultative.
Fabrice Fizaine, son équipier, manie la télécommande pour déclencher la pression. Présent chez SARP SEAV depuis plus de vingt ans, Fabrice apprécie que les tuyaux soient moins lourds et que les camions bénéficient désormais d’enrouleurs électriques. « En matière de port de charge, c’est le jour et la nuit ! » Quelques minutes plus tard, nouvelle inspection visuelle : le fond de la canalisation est parfaitement dégagé, l’eau s’écoule sans problème. Timothé Levillain prendra une nouvelle photo. Il les enverra avec son rapport au responsable d’exploitation. Retour à l’agence de Draguignan : ultime rempart contre les risques biologiques, un vestiaire pour se changer et mettre les affaires sales dans un petit container prévu à cet effet – celles-ci seront lavées par une entreprise extérieure spécialisée – et des douches sont à disposition.
Si la plupart des risques semblent maîtrisés, des améliorations sont encore possibles, notamment sur la prévention des chutes de hauteur et des TMS. SARP SEAV travaille d’ailleurs sur le sujet avec la Carsat Sud-Est. « Nous allons accompagner cette entreprise avec un contrat de prévention, explique Éric Dumont, contrôleur de sécurité, en les orientant vers des solutions comme des plates-formes de travail mobiles sur mesure, ou encore des transpalettes électriques à levée ergonomique. »
DÉTECTEUR DE GAZ
À l’agence, chaque opérateur peut vérifier à tout moment le bon fonctionnement de son détecteur de gaz, l’entreprise laissant à disposition un appareil pour les contrôler. De plus, tous les six mois, un contrôle systématique doit être réalisé. Par ailleurs, lorsque le détecteur de gaz de l’un des opérateurs dépasse un des seuils d’alarme définis, que ce soit ponctuellement ou cumulé sur une journée de travail, l’agence est alertée par smartphone ou mail. En fonction du type d’alarme, une action est déclenchée pouvant aller de l’appel téléphonique direct avec le technicien au déclenchement des secours. Car même sans descendre dans les conduits, les opérateurs peuvent être exposés à l’un des gaz.