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Déchets et eaux usées : prévenir le risque biologique

Chez Trifyl, des machines à la rescousse des agents de tri

Pour répondre aux exigences de l’extension des consignes de tri, le service public de traitement des déchets Trifyl, dans le sud-ouest de la France, s’est doté d’un nouveau centre de tri flambant neuf. L’occasion notamment de s’appuyer le plus possible sur le tri mécanique, afin que, en bout de chaîne, les agents puissent travailler dans les meilleures conditions.

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Lucien Fauvernier - 31/10/2024
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Vue d'une situation de travail dans le centre de traitement des déchets Trifyl.

Créé à la fin des années 1990, l’établissement public de traitement des déchets Trifyl couvre le Tarn, le Lauragais, le Minervois et le Haut-Languedoc mais aussi des territoires voisins sous un régime de marchés publics. En tout, 358 communes réparties sur 6 700 km2, soit 714 659 habitants, dépendent de la structure pour le traitement de leurs déchets. Pour mener cette mission, l’établissement peut compter sur 45 sites stratégiquement implantés sur tout le territoire couvert par ses services : déchèteries, quais de transfert, usine de valorisation des déchets, unité d’affinage du tout-venant, bioréacteur, plate-forme de compostage… Pour ce qui concerne le tri, c’est à Labruguière, près de Castres, que Trifyl a installé son usine nommée Brugeria. Dans ce centre névralgique de son activité, deux équipes de vingt-cinq agents se relaient quotidiennement, de 6 h jusqu’à 22 h 30, pour traiter plus de 30 000 tonnes de produits recyclables par an.

« Pour répondre aux exigences de l’extension des consignes de tri, le centre de Labruguière a été entièrement repensé et reconstruit à neuf pour être capable d’accueillir l’ensemble des emballages et papiers en extension des consignes de tri, explique Serge Issandou, directeur recyclage et logistique. Cela a demandé 22 mois de travaux, ainsi qu’un investissement d’environ 26 millions d’euros. Et depuis le 1er janvier 2023, nous avons un tout nouveau process de travail qui fonctionne bien et nous permet de faire face à l’augmentation des volumes de déchets triés. »

À première vue, l’organisation semble bien rodée. Dans un bâtiment ont d'abord lieu le dépôt des déchets et l’alimentation de la chaîne de tri à l’aide d’une chargeuse à cabine en surpression afin de préserver l’air intérieur de tout polluant. « Nous disposons de trois alvéoles dans ce bâtiment qui sont remplies alternativement afin que les déchets arrivés en premier puissent être traités en premier également, sur le principe logistique du 'first in, first out' ou fifo, indique Yoann Chateauraynaud, coordonnateur hygiène et sécurité du site. Cela permet de limiter la dégradation de certains déchets indésirables, car même s’il est censé n’y avoir ici que du papier-carton, des métaux et du plastique, des résidus organiques peuvent être présents en raison d’un mauvais tri de l’usager. »

La marche en avant des déchets

Une trémie d’alimentation permet ensuite d’apporter les déchets vers le deuxième bâtiment où se déroulent les opérations de triage. Ici commence le grand ballet du tri mécanique : chaque déchet, via 1,6 kilomètre de tapis roulants, passe par toute une série de machines – trommel, cribles balistiques, tri optique, séparateurs électromagnétiques – afin de rejoindre l’un des douze flux de tri différents. En bout de chaîne, sur le flux des refus, un robot trieur entièrement capoté s’appuie sur l’intelligence artificielle pour s’assurer qu’un déchet valorisable n’est pas oublié.

« Avec soixante pics à la minute, c’est assez impressionnant de le voir travailler, remarque Nathalie Tillier-David, chef de service valorisation centre de tri et compostage. Grâce à ces équipements, nous parvenons à un taux de tri de 95 %, le reste est assuré en cabine par nos agents qui travaillent donc sur un tri le plus “pur” possible. Auparavant, le prétri était effectué à la main par les agents qui étaient souvent exposés à des déchets variés comme des carcasses d’animaux. Avec la nouvelle installation, il y a une véritable amélioration des conditions de travail en ce qui concerne le risque biologique notamment. »

Vue d'une situation de travail dans le centre de traitement des déchets Trifyl.

Une fois la porte de la cabine de tri passée, le changement d’ambiance est complet. Le bruit des machines laisse place à une ambiance sonore feutrée. Les seize trieurs en activité ce jour sont répartis sur huit lignes, concentrés sur leurs gestes, précis et méthodiques. « Cette cabine répond en termes d’ergonomie à la norme NF X35-702 », explique Yoann Chateauraynaud. Au-dessus de chaque poste de travail, est placé un plénum soufflant qui permet au trieur de se situer dans un flux d’air neuf vertical descendant et de respirer un air non pollué. « Nous avons également imposé au constructeur des aménagements supplémentaires issus des préconisations de l’INRS comme la possibilité d’avoir un stock tampon en amont du tapis de tri », poursuit-il.

Une cabine de tri dernier cri

Chaque trieur dispose également d’un siège assis-debout, qui n’est pas utilisé en situation de travail mais lorsque l’activité est mise sur pause. Un équipement apprécié par Brigitte Pages, une agente de tri qui a connu l’ancienne configuration des locaux : « Les conditions de travail dans cette nouvelle cabine sont vraiment meilleures et, grâce au tri mécanique en amont, notre tâche est facilitée en bout de chaîne. En revanche, l’augmentation des volumes nous oblige à une cadence assez élevée… » Un constat partagé par Nathalie Tillier-David : « Même si le centre de contrôle au sein de la cabine permet de régler au mieux l’activité, et que le stock tampon évite d’avoir des tapis de tri surchargés, les agents réalisent tout de même environ 40 gestes techniques par minute, ce qui est assez sollicitant. »

Concernant le risque biologique, deux protocoles ont été définis : l’un en cas d’accident d’exposition au sang (AES), l’autre pour la découverte d’animaux morts. « Les AES sont très rares, surtout au regard des volumes traités, souligne Yoann Chateauraynaud. Malheureusement, nous ne pouvons pas encore supprimer totalement le risque à la source puisque les petits déchets piquants, mal triés à l’origine par l’usager, passent souvent à travers les mailles du tri mécanique… et nous n’avons pas trouvé de gants permettant à nos agents d’être protégés à 100 % tout en conservant une préhension suffisante. En revanche, concernant les déchets organiques, les machines permettent de ne plus se retrouver par exemple avec un cadavre de sanglier sur le tapis de tri. Mais il peut arriver que des viscères parviennent jusqu’aux agents. Dans ce cas, l’activité est stoppée et le protocole mis en place. »

Dernière étape pour les déchets triés en cabine : passer dans un compacteur pour être stockés dans un troisième et dernier bâtiment sous forme de balles. Balles qui seront par la suite vendues pour être revalorisées. Et la boucle vertueuse sera bouclée.

DES PROTOCOLES BIEN SPÉCIFIQUES

• Si un opérateur est piqué voire coupé par un objet (seringue usagée) qui se trouve sur un tapis de tri, l’agent stoppe son activité. Il convient de nettoyer la plaie à l’eau et au savon, de la désinfecter pendant au moins cinq minutes et de la protéger. Un sauveteur secouriste est appelé. Le responsable hiérarchique est prévenu et un accident du travail est systématiquement déclaré. Un avis médical doit être pris pour effectuer évaluer le risque infectieux et prescrire des examens complémentaires et, si besoin, un traitement.

• Si des restes d’un animal mort se retrouvent sur le tapis  d’une des lignes, l’activité est stoppée. La zone est ventilée par le système de ventilation normé de la cabine (norme  NF X 35-702). Un supérieur hiérarchique est prévenu. L’agent  doit enfiler un gant à usage unique puis son gant de tri.  Le cadavre est retiré à l’aide d’un outil adapté et jeté  au refus. Le tapis et les zones contacts sont désinfectés.  À la fin de l’opération, l’agent jette les deux paires de gants,  se lave les mains au savon pendant au moins trente secondes et reprend l’activité avec une paire de gants neuve.

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