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Exosquelettes, AGV et robots collaboratifs

Comment les AGV optimisent la logistique

Bridor, spécialisé dans les produits de boulangerie surgelés, utilise des AGV (véhicules à guidage automatique) pour transporter ses palettes depuis les sorties de lignes de production jusqu’aux chambres froides depuis une quinzaine d’années. Une période qui a vu la flotte s’agrandir et évoluer, avec le double objectif de soutenir la production en constante augmentation, tout en garantissant la sécurité des salariés.

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Damien Larroque - 23/12/2024
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Vue d'une situation de travail dans l'entreprise Bridor.

Servon-sur-Vilaine, non loin de Rennes, abrite l’un des plus grands sites de confection de produits boulangers surgelés au monde. Dominée par un transstockeur de 33 mètres de haut maintenu à - 30 °C et pouvant contenir jusqu’à 34 000 palettes, la manufacture s’étend sur 45 000 m2. Pour atteindre ses 250 000 tonnes de production annuelle de pains et de viennoiseries, elle emploie un millier de salariés et tourne 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Pains au chocolat, croissants, baguettes et pains spéciaux sortent donc en flux quasi ininterrompu de ses onze lignes et trouvent preneurs auprès de la grande et moyenne distribution, de l’hôtellerie-restauration et des artisans en France et dans plus de 100 pays. Bienvenue chez Bridor, enseigne appartenant au groupe Le Duff.

« Bridor est la contraction de Brioche Dorée dont le magasin originel a ouvert ses portes à Brest en 1976. C’est parce qu’il souhaitait maîtriser la qualité des produits proposés dans ses échoppes que Louis Le Duff, le créateur de l’entreprise, s’est lancé dans leur fabrication en 1984 avec un site de production au Québec, raconte Julien Leday, le responsable santé et sécurité. Quatre ans plus tard, le premier site français voit le jour. » Une croissance qui ne s’est pas démentie avec le temps, les agrandissements se succédant à un rythme régulier.

Automatiser les transferts entre les sorties de lignes et les chambres froides

Mais la croissance étant forte, le besoin d’automatiser les transferts entre les sorties de lignes et les chambres froides est devenu nécessaire. Et le passage reliant les deux zones est devenu trop exigu pour absorber les flux. Toute la journée et toute la nuit, les opérateurs de plus en plus nombreux se croisaient sur leurs gerbeurs dans un ballet de plus en plus dense. « Un nombre croissant de nos salariés passaient de longues heures statiques sur un engin qui émet des vibrations. Il fallait trouver une solution alternative à ces manutentions, indique Julien Leday. Nos réflexions ont abouti à la mise en service de deux AGV en 2007. »

LE TÉMOIGNAGE DE...

Anthony Giret, responsable technique hygiène

« Nous avons testé pendant un mois une autolaveuse autonome. Pour y intégrer les plans de nettoyage, il suffit de lui faire faire le parcours en la déplaçant manuellement, ce qui est aisé grâce à son assistance électrique. Il est possible d’ajuster le débit de l’eau, la vitesse du brossage ou encore l’aspiration aux différents points du trajet. Les dispositifs de sécurité comme le signal sonore ou la lumière bleue sont également programmables afin de les déclencher au moment voulu, comme à un croisement, par exemple. Une seconde campagne d’essais de six mois est prévue avec une autre version, qui tienne compte de nos retours, et équipée d’un logiciel et d’une interface améliorés. Si les résultats donnent satisfaction, notamment en termes de temps de réalisation des parcours, nous adopterons cette autolaveuse autonome pour de bon. »

Pour être en mesure de transporter simultanément deux palettes allant jusqu’à une tonne chacune, le dispositif retenu est particulièrement imposant avec ses 3,4 m de long, sur 1,4 de large et 2,8 de haut dans sa partie la plus élevée. Le véhicule autonome glisse cependant tout en douceur dans les couloirs qui se rafraîchissent à mesure que l’on s’approche des chambres froides et du transstockeur. Si un salarié lui coupe la route, il s’arrête 50 cm avant le contact.

Le radar qui rend cela possible n’étant au départ pas en mesure de détecter la présence d’un obstacle de moins de 20 cm de haut, il a été demandé au fabricant de revoir sa copie. En outre, une zone de stationnement pour transpalette a été clairement définie afin que les fourches n’empiètent pas sur la trajectoire des navettes. Autre amélioration demandée auprès du fournisseur, l’installation de réflecteurs chauffants car lorsque les portes des quais de chargement, situés à l’époque à proximité du passage des AGV, s’ouvraient, de la buée se formait sur les capteurs et immobilisaient les dispositifs.

Réduire la coactivité entre salariés et AGV

L’activité continuant de progresser, une troisième navette entre dans la danse en 2011 avant qu’une quatrième ne soit envisagée quelques années plus tard. « Le changement des batteries, qui sont très lourdes, était manuel et effectué sur le parcours des AGV ce qui bloquait le flux pendant une dizaine de minutes, raconte Philippe Gatel, responsable conditionnement. Nous avons donc opté pour un modèle capable de réaliser cette opération de manière autonome et avons par la même occasion remplacé les trois premiers. » « C’est vraiment mieux car cela réduit l’immobilisation du matériel et ne nécessite pas d’intervention humaine », se félicite Bruno Garcia, manager conditionnement. Un gain de temps précieux quand on sait que ce système traite une palette par minute.

Vue d'une situation de travail dans l'entreprise Bridor.

Quant aux AGV de première génération, ils ont été transférés sur le second site français de Bridor, situé à Laval. L’opération de changement de batterie y a été automatisée dès le début puisque les locaux ont été conçus en capitalisant sur le retour d’expériences des équipes de Servon-sur-Vilaine. Ainsi, les bornes de recharge de batteries ont pu être installées hors du parcours des AGV, évitant tout blocage du process et laissant plus de latitude aux salariés pour intervenir. En outre, les couloirs sont assez larges pour bien séparer les flux piétons, engins et AGV. « C’est tout l’avantage de penser la prévention dès la conception des lieux de travail, estime Julien Leday. Impossible sur notre site historique, avec l’espace imparti, de dédier une place à chacun. Heureusement, la coactivité entre salariés et AGV a été réduite au maximum. Sur huit heures, seules trois ou quatre personnes cohabitent, de manière très ponctuelle, avec les navettes. »

EXOSQUELETTES

En 2019, Bridor a mené des tests avec des exosquelettes. Ces essais ont abouti à la mise en œuvre de ces dispositifs sur deux postes. Néanmois, l'entreprise estime primordial de continuer à former les nouveaux arrivants pour que l’usage perdure. « Nous relançons des essais en nous concentrant sur le déballage de la matière première pour assurer un suivi qui permette de pérenniser ces solutions, indique Julien Leday responsable santé et sécurité. Nous avons également pu constater l’intérêt qu’elles ont pour le maintien ou le retour dans l’emploi. L’utilisation d’un exosquelette adapté associé à du temps partiel et à une limitation de port de charge a permis à l’un de nos collègues en arrêt long de reprendre le travail. Aujourd’hui, il est guéri et a retrouvé son poste initial. »

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