Ce site est édité par l'INRS
L'innovation au service de la prévention

Un nouvel équipement pour réduire la pénibilité dans la pose de pare-brise

Sekurit Service, entreprise spécialisée dans la fabrication et la distribution de vitrage automobile de remplacement, et le centre France Pare-Brise de Genas (Rhône), ont travaillé main dans la main pour développer un nouvel équipement destiné à réduire le port de charges, lors des opérations de changement de pare-brise.

5 minutes de lecture
Corinne Soulay - 21/02/2025
Lien copié
Vue d'une situation de travail chez France Pare-brise.

Chaque matin, du lundi au samedi, les techniciens du centre France Pare-Brise de Genas, près de Lyon, réceptionnent des pare-brises neufs, en provenance de leur fournisseur, Sekurit Service. L’un après l’autre, ils les installent sur une table de pose pour les inspecter minutieusement et vérifier l’absence de rayure ou de défaut avant la mise en stock. Puis, ils s’attellent au remplacement des pare-brises endommagés sur les véhicules qui leur ont été confiés.

Après avoir prélevé un vitrage neuf, retour à la même table de pose : ils ôtent le boudin de protection tout autour du pare-brise, en nettoient une première face au chiffon, fixent trois ventouses pour faciliter son transport, le retournent, nettoient l'autre face, appliquent une couche de primaire d’accrochage pour favoriser l’adhérence de la colle, puis déposent soigneusement la colle le long des arêtes, au pistolet électrique. Préparation terminée.

Jusqu’à l’année dernière, cette succession d’opérations se faisait sur une table de pose classique, sorte de tréteaux métalliques en X sur lesquels le vitrage était disposé à plat. Un poste de travail à l’origine de postures contraignantes. « Avec cet équipement, il y avait beaucoup de reflets sur le verre, ce qui nécessitait de se pencher fortement pour l’inspection. Les retournements demandaient aussi beaucoup d’effort, notamment avec les pare-brise de large envergure », détaille Murielle Rignol, gérante du centre.

Mais, désormais, fini le port de charges, et les techniciens se tiennent droits tout au long de l’opération : l’équipe dispose d’une nouvelle table ergonomique. Un équipement pourvu d’un système de roulettes et d’encoches, sur le dessus, qui permettent de faire glisser le pare-brise, de le bloquer et de le retourner sans effort, mais aussi de le placer verticalement pour faciliter son inspection. Du sur-mesure, fruit de plusieurs mois de collaboration entre Sekurit Service et le centre France Pare-brise de Genas.

L'innovation face au manque d'attractivité

Tout a commencé par un alignement des planètes. En 2021, Sekurit Service, spécialisée dans la fabrication et la distribution de vitrage automobile de remplacement, crée une branche dédiée aux accessoires destinés aux poseurs. « C’est un domaine où il y a peu d’innovations et, parallèlement, le marché de la pose connaît une forte rotation de personnel et un manque d’attractivité », constate alors Laura Ostyn, responsable de cette activité, baptisée One-stop-shop. En 2022, elle recrute un ingénieur recherche et développement, et décide d’aller observer les conditions de travail dans des centres France Pare-Brise, mais aussi des agences du réseau européen Glassdrive.

Ces deux réseaux de franchisés, tout comme Sekurit Service, font partie de la même entité mère, Saint-Gobain. « Chacun utilisait une méthode et des gestes différents, observe-t-elle. Mais, à toutes les étapes – inspection, collage, remise sur véhicule… –, nous avons identifié des difficultés. En particulier lors des retournements de pare-brises. Nous avons étudié cela avec des ergonomes : avec la position de porte-à-faux, même si les vitrages pèsent moins de 25 kg, cela fait supporter au dos du technicien une charge équivalente à 210 kg. D’où notre idée de développer des équipements innovants, plus ergonomiques. »

LE TÉMOIGNAGE DE...

Murielle Rignol, gérante du centre France Pare-Brise de Lyon Genas


© Grégoire Maisonneuve pour l'INRS/2024

« Chaque année, je priorise des améliorations à réaliser en santé et sécurité au travail. Nous avons ainsi agrandi la porte de l’atelier pour pouvoir faire entrer les poids lourds et travailler en sécurité, à l’intérieur, sur un échafaudage. J’ai aussi revu l’agencement de l’espace pour optimiser les déplacements et réduire le port de charges. Le stock en particulier a été rapproché de l’établi. Cette année, le sol a été refait pour supprimer les risques de glissade en cas de pluie, et le marquage au sol revu afin de mieux sécuriser la circulation des piétons. À chaque changement, je fais valider les plans par l’équipe avant de lancer les travaux. Enfin, nous suivons régulièrement des formations pour améliorer la communication et la cohésion d’équipe. »

Parallèlement, en 2023, un responsable marketing Sekurit Service se rend au centre de Genas pour faire remplacer le pare-brise de sa voiture de fonction. Pendant l’opération, il discute avec Khalid Assafi, le responsable de l’agence, qui lui fait part d’une idée naissante. « À 40 ans, après 20 ans à manipuler des pare-brises, on commence à ressentir les effets de ces tâches physiques, avec des douleurs dorsales. Je réfléchissais justement à créer une table de pose qui réduirait les contraintes. J’avais quelques idées… » Le client l’incite à contacter Laura Ostyn, et la collaboration débute.

Côté Sekurit Service, un comité technique européen composé d’ingénieurs et d’anciens poseurs d’autres pays, devenus commerciaux ou experts techniques, est créé pour développer le projet. Après une phase d’étude pour définir les spécifications de la future table, un premier prototype, en bois, est conçu, puis un deuxième en aluminium… À chaque fois, l’équipement est testé à Genas par Khalid Assafi, qui fait part de ses retours d’expérience et propositions d’améliorations. « Khalid est très créatif et, pour moi, la santé et la sécurité des salariés sont une priorité. Je trouvais donc intéressant qu’il fasse partie de ce projet », souligne Murielle Rignol.

S’appuyer sur les retours de terrain

Au fil de ces allers-retours, l’équipement évolue. La table originelle est trop lourde pour être transportée facilement, les concepteurs optent donc pour une combinaison d’acier et de plastique. Progressivement, l’équipement devient pliable, réglable en hauteur pour s’adapter à la taille du technicien, suffisamment résistant pour accueillir des pare-brises de poids lourds, sa stabilité est améliorée, la place des encoches et la taille des roulettes se précisent…

« Pour moi, la santé et la sécurité des salariés sont une priorité. »

En tout, sept prototypes sont nécessaires pour aboutir à une première version de la table. Celle-ci est alors envoyée en test à Genas, mais aussi aux Pays-Bas, en Estonie, en Finlande et en Allemagne. « Au-delà de la table, on souhaitait mettre en place une standardisation de la procédure, reproductible dans tous les centres, avec un principe de base : une fois le pare-brise posé sur la table, le technicien n’a plus à le soulever », précise Laura Ostyn. Les retours de terrain entraînent à nouveau des améliorations.

Restait une dernière étape : l’évaluation. En septembre dernier, Sekurit Service fait appel à un cabinet d’ergonomes pour réaliser des mesures. Khalid Assafi est alors équipé de capteurs pour évaluer les contraintes au niveau du haut du corps lors de la phase de préparation, avec l’ancienne et la nouvelle table. Les résultats sont positifs : « Les sollicitations des épaules et des bras sont réduites de 40 % », se réjouit Laura Ostyn. La fabrication est donc lancée…

Aujourd'hui, à Genas, la table de pose fait l’unanimité, comme en témoigne le technicien, Nasser Derouaz. « Même si j’ai 28 ans et que je suis en forme, pour moi c’est un soulagement. Je ne pourrais plus m’en passer. » Mais pour Laura Ostyn, l’innovation continue : « Nous sommes en lien avec des poseurs qui ont d’autres idées, notamment des aides techniques à la pose. »

ZOOM

4, c'est le nombre de salariés du centre France Pare-Brise de Genas : Murielle Rignol, la gérante, qui a racheté le centre en décembre 2020, Khalid Assafi, le responsable d'agence, et les techniciens Nasser Derouaz et Soufiane ElJafoufi.

Jusqu'à 10 pare-brises par jour sont manipulés par les salariés, qui s'occupent aussi de réparer des impacts, de changer des vitres latérales de véhicules ou des phares.

10 à 25 kg, c'est le poids moyen d'un pare-brise. Mais les vitrages de poids lourds peuvent atteindre 35 kg. Pour transporter les pièces imposantes, les techniciens sont toujours à deux et peuvent aussi se servir d'un bras de pose.

Partager L'article
Lien copié
Les articles du dossier
L'innovation au service de la prévention