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Les zoonoses et maladies vectorielles

Plus de 90 % des forestiers piqués par une tique

L’Office national des forêts (ONF) mène en permanence des actions pour prévenir la contamination des forestiers par la maladie de Lyme véhiculée par les tiques. Décryptage avec Pauline Monthioux, responsable du pôle prévention de l’établissement public.

3 minutes de lecture
Damien Larroque - 26/06/2023
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Un bucheron débite un arbre.

Travail & Sécurité. À l’ONF, qui est concerné par le risque de contracter la maladie de Lyme ?

Pauline Monthioux. L’ensemble de notre personnel qui travaille dans les forêts est susceptible d’être piqué par des tiques. Il s’agit de 2 500 techniciens forestiers, 700 sylviculteurs et 200 bûcherons. Soit plus d’un tiers de nos 8 000 collaborateurs. En moyenne, tous les ans, une vingtaine de cas de maladie de Lyme sont reconnus comme maladie professionnelle. L’étude Smarttiq, menée sur des travailleurs forestiers de la moitié nord de la France et pilotée par la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA), montre que 90 % des participants disent avoir déjà été piqués par une tique et que le niveau d’exposition mesuré par la présence d’anticorps est plus élevé chez les techniciens forestiers et les sylviculteurs que chez les bûcherons-élagueurs.

Quelles actions de prévention déployez-vous pour limiter le nombre d’infections ?

P. M. Chaque nouveau collaborateur est sensibilisé à la maladie de Lyme et aux moyens de s’en protéger. Au printemps, nous effectuons des rappels car les tiques sont plus nombreuses et actives d’avril à octobre. Nous fournissons des vêtements de travail très couvrants : polos à manches longues resserrées aux poignets, veste avec passe-pouce, pantalon équipé de guêtres… À ce propos, une équipe mène des recherches avec plusieurs partenaires afin de réfléchir à la conception de dispositifs textiles « anti-tiques » agissant de manière mécanique pour un effet nonfixant, neutralisant voire mortel. Enfin, nous encourageons nos collègues à s’inspecter soigneusement en fin de journée, particulièrement dans les plis (aisselle, genou, aine…), sans négliger le cuir chevelu. Si une tique est repérée, il faut l’extraire immédiatement car plus le temps de fixation est long, plus le risque de transmission de la maladie est élevé. Nous intégrons donc un tiretique aux trousses de secours que nous fournissons. Il faut ensuite surveiller la zone de morsure pendant plusieurs semaines pour savoir si l’on a été infecté.

Y a-t-il d’autres moyens de prévention ?

P. M. Il existe des produits répulsifs, mais le rapport bénéfice-risque de leur utilisation au quotidien n’est pas bon. Nous ne préconisons pas leur utilisation. Un vaccin contre la maladie de Lyme est en cours de développement mais il faudra attendre encore pour savoir s’il est efficace et en évaluer, là encore, le bénéfice-risque pour nos forestiers en lien avec leur niveau d’exposition. Agir sur l’organisation du travail impliquerait de ne pas aller en forêt d’avril à octobre, ce qui n’est pas envisageable. Il est également impossible de définir des lieux à éviter, puisque la population de tiques est très diffuse. Mais peut-être les données recueillies par l’Institut national de recherche pourl’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE) par le biais de son appli « Signalement TIQUE », qui invite à déclarer ses piqûres et à envoyer les tiques piqueuses à la tiquothèque de Champenoux, en Meurthe-et-Moselle, permettra de mieux comprendre l’écologie des tiques et les risques associés. D’autant qu’un formulaire dédié aux employés de l’ONF doit y être ajouté pour affiner nos statistiques et éventuellement améliorer notre démarche de prévention. De plus, à travers cette application, les agents disposeront d’un historique de piqûre, très utile en cas de problèmes de santé, et de rappels hebdomadaires sur un mois pour suivre leur état de santé après la piqûre.

SYMPTÔMES ET ÉVOLUTION DE LA MALADIE DE LYME

Une piqûre de tique n’est pas forcément synonyme de maladie de Lyme puisque tous ces insectes n’en sont pas porteurs. En outre, cette zoonose reste souvent asymptomatique. L’infection peut se manifester par une rougeur cutanée extensive autour de la piqûre dans les une à six semaines qui suivent et dont l’évolution est généralement bénigne. Néanmoins, en l’absence de traitement, dans 5 à 10 % des cas, l’infection peut s’étendre à différents organes : le système nerveux (fourmillements, névralgie, paralysie faciale, méningite…), les articulations (arthrite du genou ou du coude surtout) ou, beaucoup plus rarement, le coeur, l’oeil ou encore la peau (rougeurs ou nodules cutanés souvent au niveau de l’oreille). Si, le plus souvent, sous traitement, l’évolution est favorable en quelques semaines ou mois, des séquelles sont néanmoins possibles, notamment au niveau des articulations ou du système nerveux...

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