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Les acteurs de la prévention

Côte Saint-Jacques : un IPRP en cuisine pour améliorer les conditions de travail

Pour mener à bien la rénovation de ses cuisines, le restaurant doublement étoilé La Côte Saint-Jacques, à Joigny, s’est adjoint les compétences d’une intervenante en prévention des risques professionnels (IPRP). Forte de son expertise et de sa capacité à faire le lien avec la Carsat Bourgogne-Franche-Comté, cette dernière a conduit l’établissement à revoir à la hausse ses ambitions d’amélioration des conditions de travail.

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Damien Larroque - 01/12/2023
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Vue d'une salle du restaurant la Côte Saint-Jacques.

Installée dans la paisible cité bourguignonne de Joigny, dans l'Yonne, La Côte Saint-Jacques est une institution de la gastronomie française. Elle trouve son origine dans une pension de famille créée au sortir de la Seconde Guerre mondiale. C’est la mise en service d’un tronçon de l’autoroute A6 en 1967 qui infléchit le destin de l’affaire. « Face à la raréfaction de la clientèle engendrée par ce contournement, mon père, qui avait repris la suite de ses parents, s’est tourné vers la restauration haut de gamme, obtenant une première étoile en 1971, une deuxième en 1976 et une troisième en 1986 », retrace Jean-Michel Lorain, directeur de l’établissement qui comprend aussi un hôtel cinq-étoiles et un spa.

En 2019, un projet de rénovation de la cuisine est décidé. « L’objectif était d'abord de se doter d’un outil de travail à la fois plus respectueux de l’environnement et plus sûr pour les équipes, explique le chef étoilé. Notre vieux fourneau, par exemple, était non seulement énergivore mais rendait en plus l’atmosphère plutôt irrespirable. »

Si la crise du Covid met un coup d’arrêt au projet, elle n’entame pas la volonté du dirigeant qui le relance début 2022, épaulé par son neveu Alexandre Bondoux, destiné à reprendre les rênes, Claude Leblanc, le chef de cuisine et Marie Coscat, la responsable maintenance. La sœur de Jean-Michel soumet l’idée de faire appel à un intervenant en prévention des risques professionnels (IPRP), en l'occurrence le cabinet Capital-Palaces avec lequel elle a collaboré lors de la rénovation de son propre hôtel-restaurant. « C’était l’occasion de bénéficier d’une expertise en matière de santé et sécurité. Mais aussi d’être accompagnés pour avoir les bon réflexes et bénéficier d'un accompagnement personnalisé de la Carsat Bourgogne-Franche-Comté », confie Jean-Michel Lorain.

Réduire les risques dès la conception

Lorsque Jessica Martin Dugast, la présidente du cabinet, se penche sur le dossier, les réflexions menées par l’équipe du restaurant sont déjà avancées. Les flux sont bien pensés et les équipements retenus de nature à améliorer les conditions de travail, à l’image des marmites basculantes de grande capacité qui diminuent les manutentions. « J’ai néanmoins suggéré des correctifs pour aller plus loin en prévention, indique l’IPRP. Par exemple, si le passage d’un fourneau à gaz à un modèle à induction était prévu, réduisant les risques de brûlure et d’incendie et améliorant le confort thermique, j’ai proposé d’augmenter en plus la place accordée aux placards de stockage qui y sont intégrés afin de limiter les allées et venues des cuisiniers. »

Jessica Martin Dugast incite également à réaliser un socle maçonné pour ce fourneau. Le laisser sur pieds, comme initialement envisagé, aurait nécessité des gestes répétitifs et des postures contraignantes pour nettoyer en dessous. Le positionnement des siphons d’évacuation des eaux de lavage des sols est rectifié afin de réduire les déplacements et d’éviter que les grilles et les légers dénivelés ne perturbent les mouvements des salariés. L’IPRP calcule les vitesses d’aspiration des hottes et rappelle l’importance des débords de 30 cm pour une captation efficace des fumées.

FORMATION

Si le contrat de prévention signé avec la Carsat BourgogneFranche-Comté a aidé au financement de certains équipements (hottes, four, armoires réfrigérées, batteur, monte-charge, fourneau, marmite et sauteuse) de la nouvelle cuisine de La Côte Saint-Jacques, il a aussi subventionné une formation pour les équipes. Dispensée par CapitalPalaces après les travaux, elle a consisté à réaliser l’évaluation des risques avec les membres de la brigade. « Ce n’est pas parce qu’on a agi en prévention qu’il n’existe pas de risques résiduels. C’est pourquoi nous ne nous arrêtons pas à l’analyse de la situation initiale, et que nous accompagnons l’entreprise après la mise en place d’actions », explique Jessica Martin Dugast, présidente du cabinet de conseil. « Un suivi qui participe à faire naître une vraie culture de prévention dans l’entreprise », complète Florence Dérand, contrôleuse de sécurité à la Carsat.

S'appuyer sur une étude ergonomique 

« J’ai une formation de cuisinière et de pâtissière. J’ai travaillé dans ce milieu, j’en connais les codes et les contraintes. Je parle donc le même langage que mes clients pour les convaincre de l’intérêt des actions que je leur soumets », précise Jessica Martin Dugast. Ainsi, les améliorations du plan initial se multiplient : optimisation de l’éclairage des postes de travail, stockage réfrigéré plus conséquent dans l’atelier pâtisserie qui évite les allers-retours au sous-sol pour refroidir les préparations et les récupérer ensuite, ajout d’un capot sur le batteur pour retenir la farine et épargner les poumons des professionnels tout en facilitant le nettoyage…

« Non seulement Jessica relaye nos recommandations, ce qui est très précieux, mais en plus elle maîtrise le fonctionnement de nos dispositifs, notamment d’aide financière, précise Florence Dérand, contrôleuse de sécurité à la Carsat Bourgogne-Franche-Comté. Elle évite ainsi aux entreprises qu’elle accompagne de commettre des erreurs qui pourraient remettre en cause notre soutien, comme aller trop vite en besogne, en acquérant du matériel avant la signature d’un contrat de prévention, par exemple. »

Un salarié du restaurant en cuisine.

L’achat du four a ainsi pu entrer dans le contrat de prévention car l’IPRP a précisé dans le dossier qu’il aurait l’option autonettoyante. « La prestation de Capital-Palaces nous a encouragés à faire plus. Nous n’avions pas budgété le remplacement de notre ancien monte-charge, qui était hors service depuis plusieurs années et dont, nous semblait-il, nous nous passions très bien. Mais la possibilité de subvention nous a fait sauter le pas. Plus besoin d’emprunter les escaliers avec les poubelles », se félicite Jean-Michel Lorain.

Par son action auprès de La Côte Saint-Jacques, l'IPRP a manifestement joué un rôle primordial en faveur de la santé et sécurité au travail au sein de l'établissement. Il a permis au restaurateur d'anticiper le sujet et d'être en phase avec la politique de la Carsat et ainsi bénéficier de l'ensemble des services à la disposition des entreprises de son secteur.

DU NOUVEAU EN SALLE

En plus de la rénovation de sa cuisine, La Côte Saint‑Jacques a aussi réalisé un lifting de ses salles. « Nous avons décidé de supprimer les nappes. Un choix qui paraît anodin, un simple parti pris de décoration, mais il répond à nos objectifs environnementaux et de conditions de travail, argue Alexandre Bondoux, le futur directeur de l’établissement. Moins de nettoyage, moins de repassage, moins de temps pour la mise en place… C’est moins de produits utilisés, moins de gestes répétitifs et moins de stress. » Si les nappes participaient à l’atténuation du bruit, l’ambiance sonore est préservée par des toiles acoustiques tendues au plafond. Leur aspect miroir, réellement bluffant, reflète les mets délicats sans réverbérer les ondes sonores. « J’étais un peu réfractaire à me passer de nappes, mais la beauté de nos tables en bois et résine m’a convaincu, concède Jean‑Michel Lorain. Et comme les commentaires de nos clients à ce sujet sont positifs, pas de regret ! »

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