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Le comité social et économique

L’action de proximité est facilitée par la représentation

À Bréhan, dans le Morbihan, l’association Kervihan, qui gère plusieurs établissements d’aide à des personnes souffrant de polyhandicap, a instauré son premier CSE en 2018. Les différents acteurs reviennent sur son fonctionnement et la volonté d’agir en proximité pour améliorer la remontée d’informations et prendre les bonnes décisions.

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Grégory Brasseur - 03/04/2023
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Deux salariées de l'association Kervihan.

La transition vers le CSE s’est faite en 2018. Et la négociation a permis d’aller au-delà du cadre légal en matière de représentation. « Nous avons obtenu 14 titulaires et 14 suppléants, alors que l’effectif de la structure n’en imposait que 11. Nous voulions un CSE unique avec une représentation de nos 7 établissements », retrace Emmanuelle Le Boulanger, ergothérapeute, déléguée Force ouvrière et secrétaire du CSE de l’association Kervihan. Une CSSCT, avec 8 membres (au lieu de 3 obligatoires), a été mise en place sur le même principe.

Créée en 1971, à l’initiative du docteur Saulnier pour l’accueil d’enfants polyhandicapés, l’association s’est développée autour de Bréhan, dans le Morbihan, avec plusieurs établissements médicosociaux : instituts médico-éducatifs, foyers d’accueil médicalisé, service d’éducation spé- ciale et de soins à domicile.

Elle emploie 400 professionnels permanents ainsi que des salariés en CDD, et accueille des enfants et des adultes atteints de polyhandicap ou d’autisme sévère. « Dans les réunions du CSE, les choses sont toujours dites, y compris en cas de désaccord, constate Hervé Lainé, contrôleur de sécurité à la Carsat Bretagne. Le directeur est aussi engagé sur la question du handicap que sur la bonne tenue du dialogue social et sa traduction dans les actes. Une action pérenne a par exemple été mise en place sur la prévention des risques psychosociaux (RPS) avec, comme point de départ, une remontée de situation par les élus. »

Un travail en proximité

« Nos valeurs sont intrinsèquement liées à la nature de notre travail. Il est impossible de considérer prendre soin des résidents sans prendre soin du personnel, explique Emmanuel Martineau, le directeur. Le dialogue permanent nous permet de connaître les difficultés que nos salariés rencontrent et d’éviter d’être hors sol. » Et il reconnaît que les élus obtiennent des choses auxquelles la direction n’aurait d’ailleurs peut-être pas pensé. « Cela montre que la négociation fonctionne et que nous ne restons pas campés sur nos positions », ajoute-t-il.

Dans chaque établissement, des représentants de proximité, pas nécessairement élus au CSE, traitent des questions relatives au fonctionnement interne. Ils sont les interlocuteurs directs des cadres et de leurs équipes. « S’ils ne trouvent pas les réponses localement, ils remontent l’information en CSE. Par exemple, le foyer d’accueil médicalisé Ker Sioul a fait émerger un problème de charge de travail inégalitaire, témoigne Emmanuelle Le Boulanger. Un groupe de travail a été constitué en associant le représentant de proximité et des membres du CSE pour chercher une solution. »

Un salariée de l'association utilise un rail plafonniers pour lever un résident.

Autre exemple, malgré le traitement acoustique des bâtiments (murs et plafonds), la question des nuisances sonores a émergé. « Avec la représentante qualité, nous avons travaillé sur l’identification des sources de bruit puis la CSSCT s’est emparée de l’évaluation des nuisances sonores en s’appuyant sur des mesures. Les résultats ont été portés à la direction qui a équipé le personnel de bouchons moulés sur mesure », reprend Emmanuelle Le Boulanger.

UN CADRE ORGANISATIONNEL SOLIDE

En 2018, un CSE unique a été constitué, et complété par l'instauration d'une CSSCT. Tous les établissements de l'association, même les plus petits, sont représentés au sein de l'instance. Localement, des représentants de proximité sont les interlocuteurs directs des équipes sur les questions de santé et sécurité au travail. Quand ils identifient un problème pour lequel la solution n'est pas trouvée rapidement, le sujet est traité en CSE. La CSSCT se réunit tous les deux mois tandis que le CSE a une réunion plénière une fois par mois. Quatre de ces réunions sont centrées sur les thématiques de santé et sécurité au travail.  Tout le travail en amont sur ces sujets est réalisé au sein de la CSSCT , précise Emmanuelle Le Boulanger, sécrétaire du CSE. De plus deux référents santé au travail et handicap, à la direction et au CSE, élaborent conjointement les actions relatives au maintien de l'emploi. 

Si une décision concerne de près ou de loin le fonctionnement des services, elle est nécessairement discutée avec le CSE. Ce lien s’est renforcé avec la crise sanitaire, au début de laquelle se tenaient des points quotidiens, associant le CSE. « Emmanuelle Le Boulanger est ergothérapeute et formatrice Prap (NDLR : prévention des risques liés à l’activité physique). Elle intervient auprès des équipes avec une formatrice extérieure, et sa vision nous aide à avancer sur l’amélioration des conditions de travail. La prévention des troubles musculosquelettiques (TMS) est un sujet inhérent au travail de l’association. C’est notre première cause d’accidents du travail et de maladies professionnelles », explique Catherine Morgenthaler, directrice des ressources humaines et adjointe du directeur.

Pour chaque établissement, il faut étudier le besoin d’aides à la manutention et les enjeux liés à leur bonne utilisation. L’élue part des besoins exprimés, des tests réalisés et des discussions sur les contraintes techniques rencontrées. Très tôt, l’association a investi, d’abord pour l’établissement accueillant les résidents les plus handicapés, dans des rails plafonniers en H, permettant de couvrir toute la chambre.

De la négociation à l’action

Il y a deux ans, Emmanuelle Le Boulanger et Catherine Morgenthaler ont suivi en binôme une formation de référente handicap. Ensemble et en lien aussi avec le médecin du travail, elles ont initié un travail de fond sur le repérage précoce de problèmes de santé en lien avec le travail, chez le personnel, afin de proposer, quand c’est nécessaire, des pistes de reclassement professionnel. L’élue apporte sa connaissance des pratiques de terrain, et la directrice adjointe celle des aspects liés aux financements et aux leviers à mobiliser.

Plus récemment, le CSE a lancé une expérimentation sur les dispositifs d’alerte d’urgence, pour faire face aux situations de violences et d’événements indésirables remontées par les représentants de proximité. « Le maillage de nos établissements et le dialogue social, qui se fait dans le respect du rôle et des positionnements de chacun, favorisent la remontée d’informations pour faire les choix stratégiques les plus adaptés », constate Catherine Morgenthaler. Le CSE s’attache aussi à analyser chaque accident du travail, même bénin. Le médecin du travail assiste à toutes les réunions thématiques concernant la santé et la sécurité au travail. L’association a également été accompagnée par la Carsat Bretagne, dans le cadre de ses démarches sur la prévention des RPS et des TMS.

« Les gens ont le sentiment – j’espère – que l’on s’intéresse à leurs problèmes et à la façon de les résoudre, nous confie Emmanuel Martineau. Et je mets un point d’honneur, dès lors que l’on s’accorde sur un engagement, à le tenir dans des délais raisonnables. » Une façon, aussi, de maintenir une confiance réciproque.

LE TÉMOIGNAGE DE...

Emmanuelle Le Boulanger, secrétaire du CSE


© Gaël Kerbaol/INRS/2023

 Les comptes rendus des réunions de CSE sont de plus en plus lus. Nous observons une demande croissante de diffusion de proximité, qui nous a amenés à investir dans une application pour que les salariés les aient à disposition sur leur protable. On constate aussi qu'ils viennent nous en parler, nous demander plus d'explications. Les gens voient le travail réalisé. Avec la mise en place du CSE, le fait de porter toutes les casquettes a augmenté le temps de travail des élus. Ça nous a fait un peu peur mais, après un premier mandat, je le perçois plutôt comme un atout pour faire avancer les choses. 

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