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Agir après un accident du travail

Plates-formes de travail se déplaçant le long des mâts : les accidents sont-ils évitables ?

Trop d’accidents graves et mortels surviennent lors du montage de plates-formes de travail se déplaçant le long des mâts (PTDM), utilisées notamment pour les travaux de rénovation thermique des bâtiments par l’extérieur. Entretien avec Christine Chapus et Alain Balsière, respectivement contrôleuse de sécurité et ergonome à la Carsat Rhône-Alpes, qui ont particulièrement travaillé sur le sujet à partir d’analyses d’accidents..

3 minutes de lecture
Grégory Brasseur - 29/08/2023
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Vue d'une plate-forme de travail se déplaçant sur mâts.

Qu’est-ce qui vous a amenés à vous pencher sur la sécurité lors du montage des plates-formes de travail se déplaçant le long des mâts (PTDM) ?

Christine Chapus. En juillet 2020, un accident du travail mortel – une chute de 16 mètres – a eu lieu sur un chantier avec une PTDM en cours de montage. L’analyse de l’accident du travail a fait ressortir comme cause principale l’absence de boulonnage de tronçons de mâts, notamment en raison de sollicitations. Or la sécurité de l’opération n’était assurée que par le respect de la consigne de boulonnage au fur et à mesure du montage, le mât étant un empilement de tronçons dont la jonction est faite par boulonnage aux extrémités. En recherchant sur la base de données Epicea, on a relevé sept accidents graves ou mortels sur la dernière décennie, toujours avec du personnel expérimenté et avec la même cause principale identifiée. Nous nous sommes dit qu’il fallait agir pour améliorer la sécurité lors de l’utilisation de ces engins. Il y avait donc quelque chose à faire en conception et pour le matériel existant. Nous nous sommes orientés vers l’approche ergonomique pour envisager des solutions pouvant être mises en place sans que cela ne génère de contraintes supplémentaires pour les opérateurs.

Comment a été évaluée l’activité des monteurs ?

Alain Balsière. Nous sommes allés analyser les situations de travail, évaluer la charge physique des monteurs, faire des films, des photos et surtout des entretiens, avec l’accord de deux entreprises de travaux de façade. Le point de départ étant l’oubli de boulonnage, la question de la surcharge mentale s’est naturellement posée. Il est ressorti des entretiens plusieurs choses : une attention soutenue et de multiples interruptions de tâches augmentant le risque d’erreur du fait de l’interaction permanente avec le public, mais aussi une charge émotionnelle liée à la gestion des rapports avec les résidents sur des chantiers longs. Ces entretiens ont été validés collectivement avec les opérateurs avant présentation aux directions.

C. C. Nous avons également réalisé une veille technologique auprès d’une entreprise de location et montage de machines sur mâts. En parallèle, le Syndicat français de l’échafaudage, du coffrage et de l’étaiement (Sfece) a été sollicité. Celui-ci a porté le sujet auprès des fabricants et a corroboré nos observations via un questionnaire aux entreprises : 70 % des monteurs interrogés ont répondu avoir déjà constaté un oubli de boulonnage.

Quelles pistes d’amélioration sont envisagées ?

A. B. Tout d’abord, une note de synthèse a été rédigée pour porter auprès du groupe de travail chargé de la révision de la norme la nécessité d’y intégrer l’équipement d’un système de détection d’absence de boulonnage pour les futures plates-formes. Le travail est en cours, avec le Sfece, en collaboration avec l’INRS, la Carsat et l’Union de normalisation de la mécanique (UNM). Mais, en attendant, comment éviter les accidents lors de l’exploitation du matériel existant ? Nous avons travaillé sur des solutions adaptables, issues de données recueillies auprès des monteurs sur le terrain, pour poser des principes transmis aux bureaux d’études. Un prototype a été testé en atelier puis sur le terrain. Il s’agit d’un dispositif de sécurité extérieur à la machine, qui ne modifie pas son fonctionnement et exerce une pression constante le long du mât. S’il n’est pas boulonné ou qu’il l’est mal, un déséquilibre se crée et est détecté par un capteur. Ces essais devront être complétés par des tests de fiabilité de conception de l’équipement et des niveaux de performance requis. L’objectif est d’empêcher la montée de la plate-forme tant que le tronçon de mât n’est pas ou est mal boulonné.

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