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L'aménagement de bureaux

Comment adapter les espaces de travail aux nouveaux usages ?

Le développement du travail hybride, mêlant présentiel et télétravail, conduit de nombreuses entreprises à réaménager leurs bureaux. Alors que le coût de l’immobilier et la quête de sobriété énergétique amènent à réfléchir à l’optimisation des espaces, celle-ci ne doit pas se faire au détriment des conditions de travail.

5 minutes de lecture
Grégory Brasseur - 23/01/2025
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Vue d'une situation de travail dans un bureau.

Pour leur donner envie de venir, 72 % des actifs travaillant dans les bureaux estiment que l’entreprise doit proposer des espaces de travail « mieux qu’à la maison ». 39 % affirment par ailleurs que la qualité des locaux de l’entreprise a joué un rôle lors du choix de leur emploi. Ces données, issues du baromètre Actineo 2023 de la qualité de vie au travail, établi auprès de 1 200 actifs travaillant dans les bureaux, sont riches d’enseignements. « L’hybridation du travail semble ancrée. L’aspiration des collaborateurs pour le télétravail ne recule pas. Néanmoins, leurs exigences vis-à-vis des espaces de travail, dont ils disent qu’ils jouent un rôle sur leur santé et leur bien-être, sont nombreuses. Le bureau reste plébiscité pour son apport dans les rapports sociaux de convivialité, mais pas uniquement », précise Odile Duchenne, directrice générale d'Actineo.

À l’heure où le maître-mot est la flexibilité, elle parle plutôt de liberté. Celle de pouvoir s’organiser depuis l’endroit de son choix. Indéniablement, la crise sanitaire aura donc rebattu les cartes. Nombreuses sont les entreprises en quête de solutions d’organisation spatiale en adéquation avec les évolutions du travail, faisant le constat de bureaux sous-occupés, avec des pics de présence les mardis et jeudis. Dès lors, le nomadisme des salariés invite à une réflexion sur l’optimisation des espaces. D’autant que s’ajoutent des enjeux liés au coût de l’immobilier ou aux obligations d’améliorer la performance énergétique dictées par le décret tertiaire ». « Le sujet touche particulièrement les organisations qui ont un parc immobilier important. Les besoins sont assez différents dans les TPE-PME », relativise Éric Liehrmann, expert d’assistance-conseil à l’INRS.

Un employé de bureau sur cinq en flex-office

Si les bureaux sont des lieux assez peu accidentogènes, les salariés qui y travaillent sont néanmoins exposés à des risques professionnels d’origines diverses (troubles musculosquelettiques, bruit, risques liés aux postures sédentaires, stress, chutes, manutentions manuelles…) qui peuvent évoluer à mesure de la mise en place de nouvelles formes d’organisations spatiales. Un aspect que les acteurs engagés dans la conception et l’aménagement des bureaux ne doivent pas négliger. « Le poste de travail s’intègre dans un espace de travail et un schéma organisationnel. Cet ensemble définit des choix fondamentaux d’organisation spatiale, décrit Éric Liehrmann. À ces dimensions s’ajoutent les ambiances physiques de travail (acoustique, éclairage, renouvellement de l’air, thermique) dans lesquelles vont évoluer les salariés. Sur l'ensemble de ces sujets, l'INRS a formulé un certain nombre de recommandations que l'on retrouve dans la récente brochure Conception des lieux et des situations de travail.  »

Vue d'une situation de travail dans un bureau.

Préalablement à tout projet d’aménagement, il faut identifier les éléments structurants et les intégrer à la réflexion : les caractéristiques du travail (population et activités concernées), l’organisation de l’entreprise (la part du télétravail notamment), sa culture managériale, ses orientations économiques ou stratégiques. Dès lors, différentes typologies d’organisations, du bureau individuel à l’open-space ou au flex-office, dans lesquels les collaborateurs ne disposent plus toujours de poste de travail attribué, sont envisageables et parfois combinées en fonction des besoins.

« Les exigences des salariés vis-à-vis des espaces de travail sont nombreuses. »

Selon le baromètre Actineo, en 2023, 20 % des travailleurs de bureau n’avaient pas de poste de travail attitré. Ils n’étaient que 14 % en 2019 et 6 % en 2017. Le boom du flex-office s’explique par l’optimisation de l’utilisation des surfaces, des postes et des outils de travail, dans laquelle la mobilité est organisée et facilitée par la mise à disposition d’aménagements divers (bulles d’isolement, salles de travail collectif, espaces dédiés aux visios…).

Pour autant, des précautions doivent être prises. Les perturbations auditives et visuelles liées à un environnement constamment en mouvement peuvent être importantes. Cette organisation implique donc des exigences élevées de conception en matière de gestion des ambiances physiques, notamment du bruit. D’autres points de vigilance tiennent à l’égalité de traitement sur la qualité des espaces fournis ou encore à la charge mentale liée à la gestion de leur disponibilité. De plus, toutes les activités ne sont pas adaptées à ce type d’organisation.

Vue d'une situation de travail dans un bureau.

« Dans les projets que nous accompagnons, nous observons également une tendance de fond à créer des lieux de sociabilité qui favorisent l’échange, l’informel, la convivialité. Ces grands espaces centraux décrits comme la place du village en sont l’exemple type, observe Camille Rabineau, créatrice de la société Comme on travaille, spécialisée dans l’aménagement d’espaces de travail. Mais la création d’espaces communs et collaboratifs ne doit pas se faire au détriment de la qualité des espaces individuels. Pour la réussite d’un projet, il faut avant tout créer une culture de la discussion, donner la parole aux équipes et les impliquer dans la construction des solutions. »

Inciter au mouvement et éviter les postures sédentaires

Pour aider les entreprises dans toutes les dimensions qu’une telle démarche recouvre, l’INRS a élaboré plusieurs d’outils. « Trois niveaux de besoins doivent être intégrés dans la conception d’un espace de travail de qualité. Le confort physique (thermique, visuel, acoustique, dimensionnel...) est un socle de base indispensable. Le confort fonctionnel, ensuite, vise l’adéquation entre l’espace de travail et la tâche à accomplir. Enfin, le confort psychologique permettra de se sentir bien dans son travail », synthétise Éric Liehrmann. En 2023, la norme NF X35-102, qui constitue un véritable un cadre de référence, a été mise à jour, intégrant les nouvelles formes d’organisations spatiales. Elle s’appuie sur une approche ergonomique centrée sur les usages et l’analyse de l’activité, avec des recommandations de conception.

Vue d'une situation de travail dans un bureau.

En zoomant sur le poste de travail à proprement dit, il est possible d’activer plusieurs leviers. « Le travail sur écran peut être à l’origine de troubles musculosquelettiques, de stress, de fatigue visuelle ou même d’effets associés aux postures sédentaires. En termes de prévention, il faudra penser à l’implantation des postes de travail au regard des sources d’éclairage (naturelles ou artificielles), aux temps de travail sur les écrans et au choix de mobiliers et de matériels informatiques adaptés à l’activité et à la diversité des utilisateurs », évoque Laurent Kerangueven, expert d’assistance-conseil à l’INRS. Il est conseillé de contacter les fournisseurs de matériel pour faire des tests dans l’environnement de travail.

« Les choix sont à mettre en lien avec l'activité puis les caractéristiques individuelles, comme la présence de pathologies ou de besoins spécifiques, et pourront être discutés avec le service de prévention et de santé au travail », reprend l’expert. La prévention des risques liés aux postures sédentaires doit également être intégrée. Que ce soit au travers d’actions sur l’organisation du travail (pour favoriser l’alternance entre les tâches réalisées en postures sédentaires et d’autres permettant de se déplacer), ou l’aménagement de l’environnement de travail (positionnement des espaces techniques à l’écart des postes de travail, équipement des salles de réunion ou des espaces de convivialité avec du mobilier favorisant le changement de posture). Sans oublier la possibilité d'aménager le poste (bureau assis-debout, mobilier dynamique). L’INRS préconise de rompre les postures sédentaires toutes les 30 minutes. Ces ruptures régulières doivent être l’occasion de se lever, de bouger, tout en quittant l’écran des yeux.

BUREAUX OUVERTS ET CONFORT

Les personnes travaillant en bureau ouvert se disent fréquemment gênées par le bruit des équipements de travail, mais surtout des conversations se tenant sur le plateau. À terme, cet environnement sonore subi peut créer fatigue, stress, troubles du sommeil… La norme NF ISO 22955 sur la qualité acoustique des bureaux ouverts donne des recommandations techniques et organisationnelles pour la conception des espaces. « L’INRS est également à l’origine d’une offre documentaire visant à aider les préventeurs dans le déploiement d’une démarche de terrain pour l’évaluation de la gêne acoustique, explique Patrick Chevret, responsable de laboratoire à l’INRS. Aujourd’hui, c’est l’idée d’une analyse globale des paramètres physiques, en associant divers champs de compétences (ergonomes, acousticiens, spécialistes de l’éclairage…) qui est mise en avant. » L’intégration des contraintes d’éclairage ou encore l’impact de la densification de l’espace, permettra par exemple d’affiner les préconisations d’aménagement.

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